Communauté genevoise d’action syndicale

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Il faut une autorité pour contrôler les salaires

jeudi 5 mars 2015 par Claude REYMOND

INÉGALITÉS • depuis 34ans, les différences salariales entre hommes et femmes n’ont pas été comblées. La tendance est même inverse, les écarts se creusant à nouveau. alors que faire ? « il faut créer une autorité tripartite pour contrôler les salaires », estiment les syndicalistes genevoises.

paru le 5 mars 2015 dans Gauchebdo, par Natacha de Santignac

L’homme et la femme ont droit à un salaire égal pour un travail de valeur égale. » C’est ce qui est clairement inscrit dans la Constitution depuis 1981. Pourtant, quinze ans plus tard, en 1996, il a encore fallu la loi fédé- rale sur l’égalité entre femmes et hommes. Sans résultats, hélas ! 1981, 1996, ne sommes-nous pas en 2015 ? Est-ce que cela veut dire que depuis plus de trente ans, malgré des textes et des volontés, il reste encore un long chemin à parcourir ? Force est de constater que oui. Aujourd’hui, les femmes sont en colère et la situation doit évoluer. Rappelons que, pour un travail de valeur égale, les femmes gagnent en moyenne 20% de moins que les
hommes.

Le projet Sommaruga est clairement minimaliste

Pour Valérie Buchs, du Syndicat interprofessionnel de travailleuses et travailleurs (SIT) de Genève, « seul un contrôle de l’Etat efficace peut inverser la tendance ». Selon elle, le projet de loi de la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga prévoyant d’obliger les employeurs, qui occupent 55 personnes ou plus, à procéder à intervalles réguliers à une analyse des salaires est clairement minimaliste. « Dans le canton de Genève, seules 3,7% des entreprises seraient concernées par les contrôles proposés, ce qui est dérisoire », souligne la secrétaire syndicale. La proposition de publier les disparités dans le rapport annuel des entreprises sans en préciser les chiffres est également très nettement insuffisante ; d’une part les rapports annuels ne sont souvent pas lus par les employés, d’autre part ne pas mentionner l’ampleur des écarts est absurde.
L’ampleur, parlons-en : en 2010, le manque à gagner pour les femmes s’élevait à 7,7 milliards de francs, ramené à l’échelle mensuelle cela correspond à 677 francs par mois.

Les inégalités salariales qui persistent en Suisse, dans un système patriarcal et capitaliste qui oppresse les êtres humains et particulièrement les femmes, sont un « exemple de violences structurelles » faites sur le dos des femmes que dénonce Carolina Eraso-Soler de la Marche mondiale des femmes. L’inégalité salariale entraîne d’autres inégalités, notamment dans le couple. La femme gagnant pratiquement toujours moins, c’est son salaire, et par là même sa carrière, qui est sacrifiée lorsqu’il s’agit de réajuster le temps d’occupation, notamment lors de la venue d’un enfant.
Alors que faire ? Pour Valérie Buchs, la création d’une autorité publique de contrôle (qui pourrait être tripartite : entreprise, partenaires sociaux et Etat), avec de vrais pouvoirs d’intervention et d’investigation, représente une étape décisive. Dans un second temps, il est primordial que les sanctions encourues par les entreprises qui ne respecteraient pas la loi soient exemplaires et dissuasives. « On connaît les constantes, il faut maintenant agir », conclut Valérie Buchs.

La Suisse à la traîne sur les pays du Nord

On cite toujours les pays de Nord en exemple. En effet, force est de constater que dans ces pays les femmes peuvent travailler et avoir une carrière tout en étant mère. Ainsi, selon l’OCDE, 76% des mères en Suède travaillent en ayant des enfants de moins de 6 ans. La Suisse, en revanche, traîne en bas du tableau avec 37%. En effet, les salaires inférieurs, le manque de structures d’accueil pour les jeunes enfants, les horaires scolaires, le manque de cantines, sont autant de paramètres qui empêchent les femmes de pouvoir avoir une activité salariale valorisante et valorisée. Elaborer de vraies politiques d’accompagnement des femmes dans leur vie active permettrait d’y remédier. Nos politiques ne suivent cependant pas l’évolution des mentalités et ne veulent pas accompagner les changements de comportement qui permettraient de libérer les femmes de leur rôle traditionnel au sein de la famille.

En Valais, on a même décidé de faire exactement l’inverse dans le cadre de HarmoS (harmonisation de la scolarité obligatoire). A partir de 2016, le canton a décidé que les après-midis seront libres pour une majorité d’élèves du primaire. Qui va donc devoir prendre en charge les enfants ? Qui va devoir s’organiser ? Il y aura des structures d’accueil, certes, mais payantes ! Le calcul sera simple entre la perte du salaire le plus petit et le coût financier de la structure. Une fois encore, c’est une vision conservatrice et rétrograde de la femme mais aussi plus largement de la famille qui est mise en avant !

Dernier prétexte, le franc fort

Dans le contexte de l’abolition récente du taux plancher, la menace sur les salaires de femmes se fait encore plus concrète. Une centaine de femmes de renom ont ainsi lancé un appel dans un manifeste. Elles craignent que les patrons en profitent pour éviter d’ajuster les salaires des femmes. Le franc fort a bon dos. En plus des problèmes économiques qu’il engendre, il attise les discordes sociales ! L’égalité salariale est cependant un droit reconnu par notre constitution, et nous n’y renoncerons pas !

Pour l’égalité salariale, rendons-nous toutes et tous à Berne le 7 mars !