Communauté genevoise d’action syndicale

Organisation faitière regroupant l’ensemble des syndicats de la République et canton de Genève

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Le contre projet des chambres fédérales à l’initiative de l’UDC =

un projet dangereux !

jeudi 27 mars 2008 par Claude REYMOND

La CGAS - qui s’était engagée en faveur de la Caisse unique - participe aux activités du Comité pour une politique sociale de la santé. Lequel s’exprime sur un des objets des votations du 1er juin 2008.

Ce contre-projet signifie :

  • La mort d’une assurance sociale, la marchandisation totale de la santé.
  • La suppression pour le patient du choix de son médecin et l’établissement hospitalier où il désire se faire soigner.
  • La fin de l’accès aux soins pour une partie de la population.
  • Tout le pouvoir de décision en matière de politiques de la santé aux assureurs maladie.

Le contre projet des chambres fédérales à l’initiative de l’UDC ouvre notamment la porte à la suppression de l’obligation de contracter, au financement mon des assurances complémentaires privées, facultatives, accessibles aux personnes qui pourront se les payer. Ce contre projet enlève toute possibilité de décision et donc de contrôle démocratique aux pouvoirs publics en matière de santé au profit de l’économie privée et c’est-à-dire des assureurs maladie.

La suppression de l’obligation de contracter donne le pouvoir aux caisses-maladie de choisir les médecins qu’elles voudront bien rembourser. Ceci est une ingérence intolérable dans le droit des assurés à choisir leur médecin et ouvre la porte à des décisions totalement arbitraires.

De plus les personnes qui ont un passé médical important devront se soumettre à de nouveaux examens auprès de leur nouveau médecin qu’elles devront consulter, ce qui engendrera des coûts supplémentaires mal venus.

La suppression de l’obligation de contracter va conduire à la mise hors réseaux de certains médecins spécialistes qui ne seront consultés que par des personnes aisées avec comme conséquence l’instauration d’une médecine à plusieurs vitesses.

Le financement moniste des hôpitaux par les assureurs maladie aura les mêmes conséquences pour les patients que la suppression de l’obligation de contracter. De plus il induira un transfert annuel d’au moins 8 milliards de francs de l’Etat aux assureurs maladie, avec comme conséquence que les cantons ne seront plus à même de remplir leur mandat, de garantie d’une prise en charge des besoins de la population en matière de santé.

Pour toutes ces raisons, le Comité pour une politique sociale de la santé s’oppose au contreprojet des Chambres fédérales, soumis en votation populaire le 1 juin 2008.

Genève le 11 mars 2008 Jean Blanchard


Le Mouvement populaire des familles avait été l’initiateur du projet Caisse unique et sociale, initiative qui fut rejetée par le souverain. Cette organisation nous a communiqué une analyse de situation que nous nous plaisons à publier ici.

Une année après le vote sur la caisse unique qu’en est-il de la loi sur l’assurance maladie (LAMal) ?

Vers quoi allons-nous ?

Bilan de la LAMal 1996-2007

Aujourd’hui un nombre grandissant de familles se trouve en difficulté financière vu que les cotisations à l’assurance maladie sont devenues exorbitantes. Même si en 2008 grâce à des artifices financiers les cotisations n’ont que très faiblement augmenté. Leur poids n’a fait qu’augmenter dans le budget familial avec comme conséquence une réduction sensible de l’argent disponible.

Les primes annuelles moyennes pour les adultes sont passées de 1539 francs en 1996 à 2583 francs en 2006, soit une progression de 67,83% ou une augmentation annuelle moyenne de 6,8%. La faible augmentation des primes 2007 et probablement 2008 est essentiellement le fait de la diminution des réserves qui ont été gonflées de manière démesurée les années précédentes.

Le problème de l’augmentation des primes n’est pas nouveau et n’est pas le fait de la LAMal puisque avant son entrée en vigueur en 1996 les augmentations de cotisations variaient entre 8 et 11% l’an.

La LAMal devait être une réponse provisoire pour freiner l’explosion des coûts de la santé. Sur ce plan elle a complètement échoué. Elle est totalement inadaptée en ce qui concerne le financement.

Mais si la LAMal a de gros défauts et nous y reviendrons plus loin, il ne faut pas oublier qu’elle a apporté des améliorations importantes aux assurés.

Les principaux points positifs de la LAMal

➢ Obligation de s’assurer et suppression des réserves

L’obligation de l’assuré doit être vue comme une protection et non pas comme une contrainte. En effet lorsque l’assurance n’était pas obligatoire, les caisses-maladie pouvaient refuser d’assurer une personne malade ou âgée.

L’obligation de s’assurer a également eu comme résultat important de supprimer les réserves qu’une caisse-maladie pouvait infliger à un assuré pour une durée allant jusqu’à 5 ans. En clair, cela signifiait que lorsque vous adhériez à une caisse-maladie, celle-ci pouvait ne pas prendre en charge les frais de traitement d’une maladie chronique existante.

➢ Le libre passage intégral

La LAMal permet aussi le libre passage intégral entre les différentes caisses maladie.
Aujourd’hui aucune caisse-maladie ne peut refuser votre adhésion pour l’assurance de base. Bien que, dans la pratique, certaines d’entre elles dissuadent les personnes âgées de demander un transfert d’assureur.

➢ La suppression des discriminations liées au sexe et à l’âge

La LAMal a encore supprimé la possibilité de fixer des primes adultes en fonction de l’âge, du sexe. Elle a en effet instauré une solidarité entre jeunes adultes et personnes âgées, entre hommes et femmes et entre biens portants et les personnes atteintes dans leur santé, mais a volontairement laissé de côté la solidarité entre riches et pauvres et a généralisé l’aide cantonale aux plus démunis.

➢ L’extension du catalogue des prestations

La LAMal a eu comme effet d’étendre le catalogue des prestations de l’assurance obligatoire notamment en prenant en charge les soins à domicile (spitex), les frais des EMS, les frais de psychothérapeutes médecins, le coût de certaines médecines alternatives, certaines prestations de prévention, la suppression de la limitation à 720 jours de la couverture des traitements hospitaliers qui est aujourd’hui prise en charge sans limite dans le temps.

Par contre la LAMal a aussi entraîné des points très négatifs à savoir

➢ Les cotisations ne tiennent pas compte de la capacité économique des assurés, ce qui a pour conséquence que quel que soit votre revenu votre cotisation est la même.

➢ La légalisation des franchises à options, qui supprime la solidarité entre biens portants et malades. L’augmentation introduite en 2005 illustre le transfert de charges pesant sur tous les assurés vers les assurés atteints dans leur santé.

➢ Le subventionnement aux assurés dépend des législations cantonales. Certains cantons suisse alémaniques n’utilisent que partiellement les subventions mises à disposition par la Confédération, avec comme résultat que depuis l’introduction de la LAMal, de 1996 à 2006, 6,5 milliards de francs n’ont pas été utilisés pour atténuer l’augmentation des primes.

➢ La loi n’a que peu d’influence sur les coûts de la santé et sur les coûts à la charge de l’assurance obligatoire de soins. En sont la preuve les augmentations successives des primes et des franchises. Il aura fallu attendre plus de 8 ans pour la mise en place du tarif médical national dit « Tarmed », entré en vigueur le 1er janvier 2004 et dont l’efficacité n’est pas encore prouvé.

Entre 1996 et 2006 les coûts de la santé à charge de l’assurance obligatoire de soins ont augmenté de 8,1 milliards de francs

Les cinq causes principales de l’augmentation des coûts à la charge de l’assurance maladie obligatoire de soins sont l’augmentation des coûts pour les prestataires suivants : 20% pour les hôpitaux ambulatoires, 17% pour les hôpitaux stationnaires, 23% pour les médecins privés, 16% pour les pharmacies et 12% pour les EMS.

Répartition des coûts de l’assurance maladie obligatoire de soins en 2006
Les 20 milliards de francs dépensés pour l’assurance maladie obligatoire de soins en 2006 ont été attribués aux différents prestataires de soins ; à savoir : 4,8 milliards aux hôpitaux stationnaires, 2,7 milliards pour les soins des hôpitaux ambulatoires, 6 milliards aux médecins, 1,6 milliards aux EMS, 2,8 milliards aux pharmacies et 2 milliards pour les autres prestataires de la santé. Les cinq principaux fournisseurs du système de santé ont encaissé près de 90% de l’argent de l’assurance obligatoire de soins.

Primes de l’assurance maladie obligatoire de soins

Jusqu’en 2006 les assureurs maladie ont constitué des réserves de manière abusive sur le dos des assurés. A titre d’exemple, le taux de réserves des cantons de Genève et Vaud atteint presque 40% alors qu’il ne devrait pas dépasser 15% et à Zürich ce taux est de 35%. Concrètement cela signifie que les assurés de ces cantons ont payé des primes d’assurances maladie beaucoup trop élevées pendant plusieurs années. Pour Genève c’est 354 millions de francs que les caisses maladie ont encaissé en trop et le Conseiller d’Etat en charge de la santé à Genève affirmait que les primes auraient pu être diminuées de 10% en 2008 à Genève si le taux officiel des réserves était appliqué.

La LaMal de 1996 à 2006 - des mesures inefficaces et dangereuses

La plupart des décisions prises à ce jour par le Conseil fédéral, en matière d’assurance maladie obligatoire de soins, n’apportent aucune solution pour diminuer les coûts de la santé. Elles ne font qu’effectuer des transferts de charges entre les différents payeurs des coûts.

➢ Augmentation de la franchise de 230 à 300 francs.

➢ Augmentation du montant maximal de la quote-part de 600 à 700 francs.

➢ Suppression des médecines complémentaires du catalogue des prestations au 1er juillet 2005 ; économies réalisées : 80 millions CHF par an.

➢ Réduction de 10% des montants maximaux de remboursement pour les moyens et appareils au 1er janvier 2006 ; économies réalisées : 25 millions de francs par an.

➢ Introduction d’une quote-part différenciée, 10% pour les génériques, 20% pour les préparations originales dès le 1er janvier 2006. Economies réalisées : 100 millions CHF par année.

➢ Déplafonnement des franchises annuelles au 1er janvier 2005 : augmentation de celles-ci jusqu’à 2500 francs et réduction des rabais accordés en vue de renforcer la solidarité.

➢ Refus de prendre en charge des assurés qui ne sont pas à jour avec le paiement de leurs cotisations.

➢ Assouplissement du principe de territorialité, autorisation de projets pilotes concernant la possibilité de recourir à des prestations à l’étranger.
➢ Réduction de la valeur du point de 1 francs à 90 centimes au 1er janvier 2006 pour les analyses de laboratoire ; économies réalisées : 60 millions de francs par an.

Quelques points positifs sous pression de notre initiative « pour une caisse unique »

➢ Introduction d’une baisse des taux de réserve minimaux des assureurs : 10% pour les caisses comptant plus de 150 000 assurés ; 15% pour celles comptant de 50 000 à 150 000 assurés ; 20% pour les assureurs comptant moins de 50 000 assurés. Application progressive à partir de janvier 2007
➢ Diminution de 50% des cotisations pour les enfants et les jeunes adultes au moins pour les bas et moyens revenus.
➢ Publications des comptes nationaux des assureurs maladie

Sous couvert de la responsabilisation….

En voulant soi-disant responsabiliser les assurés par de telles mesures le Conseil fédéral essaie de les culpabiliser en leur faisant croire qu’ils sont les principaux responsables de l’augmentation des coûts de la santé.
Ce discours sur la responsabilisation des assurés frise l’indécence. Jusqu’à preuve du contraire les gens ne choisissent pas d’être malade. De plus toutes les études prouvent qu’une personne, de par son appartenance à tel ou tel milieu social, n’est pas égale devant la maladie et l’espérance de vie.

Pourquoi en matière de responsabilisation des coûts de la santé occulter la responsabilité des entreprises ?

Selon une étude du SECO de septembre 2000 « les coûts du stress en Suisse » plus du quart des travailleuses et des travailleurs, interrogés ont souffert de stress souvent ou très souvent durant les 12 derniers mois. De plus, 70% des personnes interrogées affirment que les contraintes subies sur leur lieu de travail sont importantes voire très importantes. Il en résulte un coût global de 7,9 milliards de francs si l’on additionne les coûts du stress au travail liés à la maladie, aux maladies professionnelles et aux accidents.

Un démantèlement programmé

➢ La première étape de ce démantèlement a été l’augmentation de la franchise de base, des franchises à option et de la quote-part réduisant à néant la solidarité entre les personnes en bonne santé et celles atteintes dans leur santé, car les charges réparties sur l’ensemble des assurés ont été transférées vers les assurés atteints dans leurs santé. De plus l’augmentation des franchises favorise les personnes en bonne santé ou les personnes qui ont les moyens de payer une telle franchise, par contre elle engendre une paupérisation d’une partie de la population qui, n’ayant pas les moyens de payer une telle franchise, renonce à se faire soigner avec des conséquences graves sur leur santé à moyen terme.

➢ La deuxième étape a été la suppression des 5 médecines alternatives, l’homéopathie, la médecine chinoise, la thérapie neurale, la phytothérapie et la médecine anthroposophique, du catalogue de prestations de l’assurance obligatoire de soins parce que soi-disant elles ne remplissaient pas les conditions d‘efficacité, d’adéquation et d’économicité définies par l’article 32 de la LAMal.

Il est tout même surprenant que Pascal Couchepin ait pris cette décision avant la sortie du rapport PEK d’avril 2005 sur ces médecines et dont les conclusions, comme par hasard, ne justifiaient pas cette décision.

➢ La troisième étape a été l’introduction d’un nouveau régime de remboursement des psychothérapies et une redéfinition des prestations des soins psychiatriques au 1er janvier 2007

La quatrième étape est le contre projet des chambres fédérales à l’initiative de l’UDC.

D’autres propositions menacent encore la LAMal, comme

➢ La création d’une assurance obligatoire d’aide et de soins pour les personnes âgées de plus de 50 ans.

Cette assurance qui prévoit une prime mensuelle supplémentaire unique de 158.-Frs.- pour les personnes de plus de 50 ans est une remise en cause d’un des éléments les plus positifs introduits par la LAMal à savoir la solidarité entre générations. Cette solution est d’autant plus absurde que nous serons tous âgés un jour. De plus elle n’apporte aucune réponse à l’augmentation des coûts de la santé. Tout au plus, elle effectue un transfert de charges portées aujourd’hui par l’ensemble des assurés, vers une partie ciblée de la population. Ainsi, l’essence même de la LAMal est remise en cause.

Une autre invention de Pascal Couchepin

➢ « Dans tous les cas où des soins de traitement ne sont pas nécessaires, donc dans une situation sans maladie sous-jacente, l’assurance maladie ne fournirait plus de prestations, même pour les soins de base ». Monsieur Couchepin invente les soins de traitement qui sont de fait des soins de base alors qu’il s’agit toujours de soigner un malade. Il est totalement absurde et faux de penser qu’une personne qui ne peut accomplir les activités de la vie quotidienne, se lever, faire sa toilette, manger, se déplacer, ne souffre pas d’une maladie sous-jacente.
Des objectifs antisociaux

Les objectifs visés par toutes ces révisions ne sont malheureusement pas guidés par le souci de répondre aux besoins de la population en matière de santé mais bien par :

➢ La volonté des assureurs maladie de s’enrichir grassement par la création de nouvelles assurances complémentaires aux frais des assurés.

➢ L’intention de transférer tout le pouvoir de contrôle du système de santé public vers le secteur privé et c’est-à-dire les assureurs, notamment par la suppression de l’obligation de contracter et le financement moniste des hôpitaux

Des Obstacles majeurs à une politique sociale de la santé

➢ La liberté du marché s’oppose à la clause du besoin en matière de santé Aujourd’hui la santé est devenue une marchandise comme les autres pour les responsables des caisses-maladie et les responsables économiques. C’est un domaine où il y a des profits à réaliser. Le Conseil fédéral, les assureurs maladie ne parlent plus de patient ou d’assurés mais de clients.

Concentrer les caisses maladie dans les mains de quelques assureurs privés !
Le directeur d’Helsana affirme que d’ici deux ans il ne restera que quatre caisses-maladie. Il propose en plus des assurances à la carte couvrant les prestations que les assurés pourront se payer. Au revoir la solidarité et l’accès aux soins pour tous.

Le MPF :

  • Réaffirme que l’accès aux soins est un droit fondamental universel que la société doit garantir à chaque personne de sa naissance à sa mort. Il s’agit de souscrire à un contrat de société basé sur la solidarité, éliminant l’exclusion et respectant la dignité humaine.
  • Exige le maintien de la couverture des soins illimitée dans le temps à l’intérieur de la LAMal. Il demande en outre une formation adéquate des prestataires de soins afin de mieux venir en aide aux personnes qui souffrent ou sont fragilisées, ce qui implique aussi une dotation en personnel plus importante dans les établissements hospitaliers les établissements pour personnes âgées et/ou handicapées, comme pour l’aide et les soins à domicile.
  • Demande une révision fondamentale du financement de la LAMal tenant largement compte des moyens d’existence des gens ainsi que l’utilisation d’autres sources de financements possibles.
  • Demande l’application immédiate des recommandations concernant le taux des réserves avec la diminution consécutive de nos cotisations.
  • Demande la mise sur pied d’une politique de prévention qui tiennent compte des différents facteurs sociaux et de la diversité des publics à qui l’on s’adresse.
  • Dénonce les tendances à la stigmatisation de la population en catégories à risques, les gros, les vieux, les dépressifs les fumeurs etc. Ces situations sont des révélateurs de phénomènes de société qui dépassent largement le cadre de l’assurance maladie.