Communauté genevoise d’action syndicale

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refusez Managed care (réseaux de soins intégrés)

Un projet lacunaire et dangereux

mercredi 16 mai 2012 par Claude REYMOND

L’USS est favorable à l’encouragement des soins intégrés s’ils sont au service des patient(e)s. C’est pourquoi, avec le ssp, l’ASI et d’autres organisations professionnelles du secteur de la santé, elle a développé le modèle de l’interlocuteur/interlocutrice personnel de santé. Ce modèle a été présenté en son temps à la presse et intégré au processus décisionnel politique, au début des délibérations parlementaires sur le projet « Managed care », également dans le but d’y incorporer certains de ses éléments ; cela, aussi pour en intégrer des éléments au projet « Managed care », ce qui a échoué.

Ce projet souffre de graves lacunes. Ses principaux points faibles sont décrits ci-après.

La coresponsabilité budgétaire

Le réseau de soins intégrés devra conclure un contrat avec une caisse-maladie et établir un budget. À cet effet, on estimera les coûts des assuré(e)s pour l’année à venir. Le réseau sera coresponsable du respect de ce budget. Si les coûts réels sont inférieurs à ceux budgétisés, le réseau fera alors un bénéfice que lui et la caisse se partageront. S’il s’agit au contraire d’une perte, le réseau devra aussi passer à la caisse. Cette coresponsabilité budgétaire a pour conséquence que les médecins d’un réseau auront un intérêt financier à prescrire avec retenue certains traitements – particulièrement ceux qui sont onéreux – ou à y renoncer.

Déterminer si un examen doit être réalisé ou non, ou un traitement prescrit (p. ex. des séances de physiothérapie) ou non est sou- vent une question d’appréciation. Et comme les caisses décideront librement avec quels réseaux elles collaboreront, elles pourront faire pression sur ces derniers et choisir ceux qui sont les plus avantageux financièrement.

La possibilité pour des caisses de conclure des contrats léonins

Quiconque n’était aujourd’hui pas satisfait d’un réseau pouvait en changer sans problème. À l’avenir, ce ne serait plus le cas. Demain, les caisses pourront proposer aux assuré(e)s des contrats qui les lieront pendant une période pouvant aller jusqu’à trois ans. Et lorsqu’un(e) assuré(e) voudra changer de caisse avant l’échéance du contrat, il devra s’acquitter d’une prime de sortie d’un montant encore inconnu et qui sera mentionné en caractères minuscules sur le contrat. Les contrats sur plusieurs années et l’obligation de payer une prime de sortie avant la fin du contrat ne concerneront pas uniquement les modèles de soins intégrés, mais aussi ceux avec franchise plus élevée, du médecin traitant et du bonus/malus.

Le pouvoir renforcé des caisses

Les caisses décideront librement des réseaux avec lesquelles elles concluront un contrat. Au- cune obligation de contracter n’est, de fait, prévue. Les caisses ne seront en outre pas tenues de proposer un réseau. Elles et les réseaux concluront ensemble un contrat qui réglera leur collaboration, l’échange de données, la garantie de la qualité et le remboursement des prestations. Ces contrats n’auront pas à être agréés par une instance et c’est l’opacité qui se verra favorisée, en lieu et place de la transparence. La question de l’échange de données devrait, entre autres, s’avérer épineuse. Les caisses n’ont aucune obligation concernant leur offre. Ainsi, elles pilote- ront l’offre en matière d’assurance de base et influenceront la sécurité de l’approvisionnement en soins. En effet, s’il en va selon la volonté du Conseil fédéral, la majorité de la population devra passer à un modèle de soins intégrés.

Le libre choix du médecin réservé aux nanti(e)s

À l’avenir, tous et toutes les patient(e)s qui n’adhéreront pas à un réseau devront s’acquitter de 15 %, au lieu de 10, des frais de traitement et cela, jusqu’à un montant total de 1000 francs par an, à quoi il faut ajouter au moins 300 francs de franchise annuelle. Celles et ceux qui ne seront pas en mesure de faire face financièrement à ce renchérissement supplémentaire qui ne corres- pond à aucune augmentation des prestations par rapport à aujourd’hui – alors que les primes des caisses-maladie sont déjà élevées – devra rejoindre un modèle de réseau de soins intégrés. Il ne pourra alors plus choisir son médecin librement. La quote-part par prestation sera maintenue à 10 % comme aujourd’hui et la limite supérieure de la quote-part annuelle sera de 500 francs. Seuls ceux qui ont les meilleurs revenus pourront se permettre de choisir librement leur médecin. Or, le libre choix du médecin était pour tout le monde, riches comme pauvres, une des con- quêtes sociales de l’assurance-maladie.

Le projet « Managed care » renforcera la position des caisses, conduira à une médecine à deux vitesses, créera de l’opacité dans le fonctionnement de l’assurance-maladie ainsi que les conditions qui permettront aux seuls riches de choisir leur médecin.



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