Organisation faitière regroupant l’ensemble des syndicats de la République et canton de Genève
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Tribunal des prud’hommes, jugement du 6 octobre 2006, Cour d’appel des prud’hommes, arrêt du 7 juin 2007, Tribunal Fédéral, arrêt du 16 novembre 2007
En date du 30 avril 2001, X a été engagée par Y SA, ci-après Y, en qualité de « responsable administration des ventes ». Son salaire mensuel brut fut fixé à CHF 7’100.— plus une rémunération variable représentant 10% du salaire annuel. Dès le 1er septembre 2002, X a été nommée « sales administrator manager », et a reçu des tâches supplémentaires. Le 30 juin 2003, X a sollicité une évolution de son salaire ainsi qu’une évolution de ses responsabilités au vu des compétences qu’elle avait démontrées. Le salaire mensuel brut de X a, dès le 1er janvier 2004, été porté à CHF 9’550.—. Dans le cadre d’une restructuration de Y, X a refusé le nouveau poste qui lui était proposé, dès lors qu’il impliquait une restriction de ses responsabilités, et a sollicité l’obtention du poste hiérarchiquement plus élevé de F, ce en conformité de l’engagement verbal pris par Y lors de l’engagement de X.
Malgré le refus de X, Y lui a annoncé qu’elle aurait le nouveau poste proposé dès le 1er janvier 2005, et que le poste hiérarchiquement élevé de F ne lui serait pas donné, dès lors que d’autres candidats correspondaient mieux au profil et qu’aucun engagement n’avait été pris par Y. X est tombée en incapacité de travail dès le 24 janvier 2005. Par pli adressé à Y du 25 février 2005, X a évoqué le harcèlement et la discrimination dans la rémunération et la promotion dont elle estimait avoir été victime. Le 12 mai 2005, X a été licenciée pour le 31 juillet 2005 ; X s’est opposée au congé en faisant notamment valoir qu’elle avait été licenciée alors qu’elle invoquait le principe de l’égalité entre hommes et femmes et qu’elle était harcelée depuis des mois.
Le 26 janvier 2006, X a ouvert action contre Y devant le Tribunal des prud’hommes de Genève en concluant au versement de CHF 418’914.— à titre de différence de salaire, d’indemnité pour licenciement abusif et discriminatoire, d’indemnité pour tort moral et de remboursement de frais de déplacement.
Par jugement du 6 octobre 2006, le
Tribunal des prud’hommes a déclaré irrecevable la demande de X dans la mesure où elle tendait à la condamnation de Y au paiement d’une indemnité pour la discrimination directe dans la promotion et la formation. Saisi d’un appel de X, la Cour d’appel a confirmé le jugement du Tribunal des prud’hommes, sans donner suite à la demande d’expertise de X. Le Tribunal fédéral a ensuite admis le recours en matière civile interjeté par X, annulé l’arrêt cantonal et renvoyé l’affaire à l’autorité cantonale pour qu’elle ordonne l’expertise sollicitée par X.
Le Tribunal fédéral rappelle qu’en vertu de l’article 343 al. 4 CO, applicable au terme de l’article 12 al. 2 LEg, le droit fédéral impose aux tribunaux cantonaux un devoir d’examen étendu ; les tribunaux cantonaux doivent ainsi veiller à ce que les moyens de preuve soient mentionnés et les preuves administrées.
En l’espèce, le but de l’expertise sollicitée par X était de dire si le fait que X avait été écartée de la sélection du poste de chef du département Business Support était fondé sur des raisons objectives suffisantes autres que le sexe, dire si les activités de X et de ses collègues masculins étaient de valeur égale ou non, cas échéant dans quelle proportion elles différaient et dire quelle rémunération non discriminatoire par rapport à ses collègues masculins X aurait dû recevoir pour son activité.
Le Tribunal fédéral relève à ce propos que « si l’équivalence entre les diverses fonctions d’une même entreprise ne saute pas aux yeux ou si elle n’est pas établie par d’autres modes de preuve, les tribunaux cantonaux doivent ordonner des expertises. Les experts doivent alors décider si ces fonctions sont comparables les unes aux autres et déterminer les critères permettant de mettre à jour un cas de discrimination. Le juge qui refuse d’ordonner une expertise requise par une partie consacre une violation de l’art. 12 al. 2 LEg, à moins que l’expertise apparaisse d’emblée inutile, parce que, par exemple, le juge dispose lui-même des connaissances scientifiques nécessaires pour élucider une possible discrimination liée au sexe. »
En l’espèce, la Cour cantonale n’a pas ordonné l’expertise judiciaire sollicitée par X. Or, les magistrats de cette Cour n’ont jamais prétendu avoir des compétences techniques spécifiques pour comparer les activités des employé-e-s de Y. Le Tribunal fédéral relève par ailleurs que le raisonnement de ces magistrats ne s’apparente pas à une approche scientifique de la discrimination invoquée et qu’il n’est pas patent que les fonctions exercées par les employé-e-s de Y étaient équivalentes. Le Tribunal fédéral conclut dès lors que la Cour cantonale n’était pas en mesure de refuser d’ordonner une expertise sans violer l’article 12 al. 2 LEg. Le Tribunal fédéral relève de plus qu’une expertise aurait également permis d’élucider une éventuelle discrimination dans la promotion.
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