Communauté genevoise d’action syndicale

Organisation faitière regroupant l’ensemble des syndicats de la République et canton de Genève

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DECLARATION FINALE DU GROUPE AVIVO

à l’Assemblée constituante du 31 mai 2012

vendredi 1er juin 2012

La Constitution de 1847, socle de notre Constitution actuelle, s’était inscrite dans un moment historique majeur de notre République. Cette Constitution, révolutionnaire pour son époque, s’est enrichie, grâce aux luttes de nombreuses générations, de très importantes conquêtes démocratiques, sociales et écologiques. Du fait de son appartenance à la Confédération suisse, notre Canton est soumis à un « droit supérieur », celui de la Constitution fédérale. Une révision totale de notre Constitution se doit d’être un événement exceptionnel permettant d’intégrer à notre édifice républicain de nouveaux espaces pour la solidarité et pour les droits démocratiques et sociaux.

Dans son projet de constitution pour la Corse, Jean-Jacques Rousseau remarquait que « plus la monnaie joue un rôle éminent dans la société, plus les inégalités se creusent et répandent la plus grande misère ».
Le néolibéralisme, qui répand à travers le monde le désastre économique et écologique, la misère sociale et la violence, en constitue une flagrante démonstration.

Genève n’a pas échappé à l’offensive néolibérale. L’Etat social et les services publics, le droit du logement et la protection des locataires, le statut du personnel de la fonction publique et du secteur subventionné, l’autonomie communale et le statut particulier de la Ville de Genève, les droits démocratiques en matière de référendums et d’initiatives populaires notamment, ont été, ces dernières décennies, les cibles de violentes attaques, ratées ou réussies, de la part des milieux de la finance et des affaires.

Pour ces milieux, qui disposent d’énormes moyens économiques, financiers et politiques, mettre en place une Assemblée constituante était l’occasion rêvée pour atteindre, d’un seul coup, plusieurs de leurs cibles.

C’est dans ce contexte de rapport de forces nettement défavorable au mouvement social, que l’Assemblée constituante a vu le jour à l’automne 2008, avec une majorité d’élu-e-s d’obédience néolibérale.

A l’opposé, c’est dans le but de défendre l’Etat social et les services publics et pour promouvoir de nouveaux droits démocratiques, sociaux et environnementaux que nous avons pris part à l’élection de l’Assemblée constituante. Le score supérieur à 10%, obtenu par notre liste à cette élection, permettant à ses 9 élu-e-s de constituer le 4ème groupe en importance au sein de cette Assemblée, a représenté, pour l’AVIVO, un formidable témoignage de confiance et de soutien.

Tout au long de nos travaux, notre Groupe s’est constamment battu, en commissions et en plénières, pour préserver les acquis de la Constitution actuelle et pour de nouvelles et véritables avancées démocratiques, sociales et écologiques.

Toutes nos propositions, plusieurs centaines, ont été soit sèchement rejetées, soit récupérées pour en limiter la portée. Et lorsque certaines de nos propositions échappaient à la vigilance de la « convergence néolibérale », majoritaire dans notre Assemblée, elles subissaient le même sort lors des séances suivantes.

Le fonctionnement coûteux et antidémocratique de l’Assemblée

Outre la mise en place d’une coprésidence, monopolisée par les mêmes groupes, et surtout fort coûteuse, des millions ont été gaspillés en commissions et en séances plénières. En effet, les « accords de convergence », conclus en dehors des instances de notre Assemblée par les groupes de droite, des socialistes, des verts et des associations, ont montré qu’il aurait été possible de faire l’économie de la grande majorité des séances de commissions et de plénières. Ces dernières n’ont finalement été que des lieux de mises en scène grossières et de simulacres de débats démocratiques.

Un projet de constitution inacceptable

Le projet de constitution, issu des « accords de convergence », qui sera adopté ce soir par une large majorité, représente une grave régression démocratique et sociale. Il est au diapason de l’idéologie néolibérale. Il a permis à ses représentants au sein de notre Assemblée d’atteindre effectivement la plupart de leurs cibles. En effet, dans ce projet :

  • les activités de l’Etat ne sont plus que des « compléments à l’initiative privée et à la responsabilité individuelle ».
  • le passage aux pourcentages de 3% du corps électoral pour les référendums cantonaux et de 4% pour les initiatives constitutionnelles, représente une grave régression démocratique. Il en est de même de l’allongement à 5 ans des mandats du Conseil d’Etat, du Grand Conseil et des instances communales.
  • l’autonomie communale est fortement menacée et le statut particulier de la Ville de Genève est purement et simplement aboli.
  • la suppression de l’article 120 de la Constitution actuelle concernant les fonctionnaires, précarise le statut du personnel et porte gravement atteinte à l’impartialité de l’Etat.
  • les articles concernant les finances et la fiscalité des personnes morales favorisent encore davantage les intérêts des milieux de la finance et des affaires, au détriment de l’Etat et de la grande majorité de la population.
  • toutes les dispositions de la Constitution actuelle concernant les services publics en général et qui définissent en particulier l’organisation et la mission des Etablissements publics Médicaux, des Services Industriels de Genève, des Transports Publics Genevois et de la Banque cantonale notamment, ont été saccagées dans le but de les soustraire au contrôle démocratique et de favoriser les intérêts du secteur privé.
  • toutes les dispositions et les acquis de la Constitution actuelle concernant le droit du logement et la protection des locataires, l’énergie et le nucléaire, l’interdiction de la chasse, de la fumée passive et des chiens dangereux, ont été laminés et affaiblis.
Des « avancées » en trompe-l’œil

Dans leur propagande en faveur du projet, les partenaires des « accords de convergence » et les milieux qui les soutiennent, vont prétendre, ils le font déjà, que leur projet représente une formidable avancée en matière de droits fondamentaux. En réalité, les articles les concernant sont dépourvus du caractère contraignant et ne sont, pour la plupart, que des reprises partielles et affaiblies des dispositions qui se trouvent déjà, soit dans la Constitution fédérale, soit dans notre Constitution actuelle.

Un projet à contre-sens de l’histoire

Pour le Groupe AVIVO, le projet de constitution qui nous est proposé aujourd’hui, va à contre-sens de l’histoire et à l’encontre des aspirations profondes et des intérêts de la population genevoise. Nous le combattrons résolument, avec la certitude que le peuple genevois parviendra, le 14 octobre prochain ou plus tard, à rectifier le tir et à reprendre sa marche vers un Etat plus social, plus démocratique et plus solidaire.

Pour le Groupe AVIVO
Souhail Mouhanna

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