Communauté genevoise d’action syndicale

Organisation faitière regroupant l’ensemble des syndicats de la République et canton de Genève

Rue des Terreaux-du-Temple 6 - 1201 Genève

iban CH69 0900 0000 8541 2318 9

une Vraie économie pour vrais chômeurs

mercredi 12 décembre 2007 par Claude REYMOND

publié dans Le Courrier du 12-12-2007

MICHEL SCHWERI

Le scrutin sur la réforme du chômage à Genève dépasse la seule acceptation d’un nouveau texte législatif. Ce dernier concerne les chômeurs et leurs proches ce qui représente déjà du monde mais aussi tous les travailleurs en emploi, car la loi agit sur l’ensemble du marché du travail. Le chômage n’est en effet pas imputable aux chômeurs, mais bien à l’organisation économique de la société. Les gains de productivité et les restructurations enregistrés raréfient le nombre de places par rapport à la hausse de la population en âge de travailler.

La concurrence entre salariés s’accroît, débouchant sur une remise en cause des conditions de travail et l’exclusion des plus faibles, des moins bien formés, des moins rentables. Sur cette toile de fond, les réformes prescrites par les autorités font peser le poids principal du chômage sur les sans-emploi.

Le nouveau texte vise essentiellement à améliorer l’« employabilité » de ces derniers par des mesures individuelles de formation ou de meilleur suivi des dossiers, sans toucher à l’organisation déficiente du marché du travail. Bien plus, s’il n’y a pas suffisamment d’emplois à Genève pour tout le monde et si la nouvelle loi réussit à réinsérer rapidement des chômeurs dans le monde professionnel au chausse-pied si besoin, en privatisant le placement , d’autres travailleurs en seront éjectés par ailleurs.

La rotation au chômage s’accélérera, permettant à l’économie de trier et de conserver les meilleurs éléments ­ « réinsérables » à peu de frais payés par la collectivité , excluant durablement les autres. Pour ces derniers, la nouvelle loi institutionnalise l’« économie sociale et solidaire ». Un marché ni privé ni public, largement subventionné pour réparer les nuisances sociales et environnementales que les entreprises externalisent sur le dos de la société.

Théoriser l’existence de l’économie sociale revient en effet à accepter le fait que l’économie « primaire » ne fournira plus une place adéquate à chacun ; tout en l’aidant à rentabiliser encore plus sa production par l’allégement de ses charges. Ainsi, la reprise et le recyclage d’ordinateurs devraient obligatoirement échoir aux producteurs et aux vendeurs de ces ordinateurs neufs, avec la création des places de travail nécessaires dans la « vraie » économie et non plus dans des entreprises sociales subventionnées. Autre exemple, la garde d’enfants par les associations solidaires exonère les entreprises de mettre en place des crèches, où de « vrais » emplois pourraient aussi être créés.

Certes, l’économie sociale existe. Elle fournit actuellement des prestations utiles à la société et redonne une dignité bienvenue à ses employés. Se contenter toutefois de la renforcer revient à abdiquer le combat avec l’économie « primaire » afin de lui faire intégrer ses coûts réels, sociaux et environnementaux. Dans ce sens, et même si ce n’est pas l’objet du prochain scrutin, une solution pour résorber le chômage reste une réduction drastique du temps de travail. Dans l’immédiat, afin de lutter contre le chômage en sauvegardant les droits des chômeurs, il faut commencer par refuser la nouvelle loi.