Communauté genevoise d’action syndicale

Organisation faitière regroupant l’ensemble des syndicats de la République et canton de Genève

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Reliure SA

les faits

tels qu’ils pourraient être présentés à la CRCT

lundi 18 février 2008 par _information fournie par la composante
Reliure SA
Chemin des Léchères 2
1217 Meyrin/Genève
Tél. 022 782 29 29 – Fax 022 782 17 62

1. Le 14 juin 1996, élu au Conseil administratif de la Ville de Genève, Pierre Müller démissionne de son poste d’administrateur unique de la Reliure SA. Son épouse Monique est inscrite comme administratrice unique à sa place (pièce 1).

2. Le 19 juin 2007, ayant terminé son mandat à la tête de la Ville de Genève, Pierre Muller redevient administrateur unique de la Reliure SA à la place de Monique Müller (pièce 1).

3. Reliure S.A. est signataire du CCT de l’industrie graphique (pièce 2)

4. En juillet 2007, M. Muller contacte la Régie du Centre pour la mise en vente du bâtiment d’exploitation qui appartient à Reliure SA. Un contrat de 6 mois est signé pour mandater la Régie du Centre pour cette vente. (Ceci a été confirmé en audience de conciliation le 12 février 2008 par M. Muller)

5. Dès le 1er août 2007, la bâtiment de la Reliure SA est mis en vente par l’intermédiaire de la Régie du Centre au prix de Fr. 7’000’000.-. (pièce 3 : page du site www.regieducentre.ch). Cette mise en vente s’est faite sans informer le personnel et la direction de l’entreprise.

6. Depuis le 22 novembre 2007 au moins, la vente de l’immeuble est aussi annoncée sur le site de la Fondation pour les terrains industriels de Genève (FGI) (piéces 4)

7. Le 29 novembre 2007, M. Muller demande à la direction de licencier 2 personnes pour réduire la masse salariale. MM. Claude Cuche et Denis Bouchet sont touchés par cette mesure.

8. M. Bouchet, n’étant mis au « bénéfice » que d’un mois de délai de congé, a achevé toute activité au 31 décembre 2007 et s’est inscrit au chômage.

9. Le 3 décembre 2007, M. Müller informe la direction de problèmes d’avenir de l’entreprise suite aux mauvaises affaires des dernières années. Apparemment la fermeture de l’entreprise et d’autres licenciements ne sont pas évoqués.

10. Le 7 décembre, interpellé par ses salarié-e-s, M. Muller les informe des difficultés financières de l’entreprise et reconnaît la mise en vente du bâtiment. Aucune information précise concernant d’autres licenciements, la vente des machines et la fermeture de l’entreprise n’est donnée. M. Muller affirme cependant qu’il ne retiendra pas les personnes qui souhaiteraient quitter l’entreprise.

11. Le 19 décembre 2007, les lettres de licenciements sont remises en mains propres à chacun-e des salarié-e-s restant-e-s, soit 14 personnes dont 2 apprentis de 1ère année qui « reçoivent » 1 mois de délai de congé (pièce 4 bis). Seize personnes sur 16, soit la totalité du personnel salarié, ont donc été licencié en moins de 30 jours.

12. Se pose la question de la légalité du licenciement des apprentis dont le contrat de travail est paritaire avec la commission d’apprentissage (pièce 4 bis). En fait la commission d’apprentissage n’a pas informée du licenciement formel remis, mais seulement de la fermeture prochaine de l’entreprise et que celle-ci s’occupait de leur retrouver une place (pièce 4 ter).

13. Parmi les licenciés, les 2 apprentis et une autre personne ont été engagés par Reliure SA après la mise en vente du bâtiment par la Régie du Centre.

14. L’art. 335d CO considère qu’il y a licenciement collectif si le nombre de licenciements est au moins égal à 10 dans des entreprises de plus de 20 travailleurs. Le CO ne précise pas s’il y a aussi licenciement collectif s’il y a plus de 10 licenciements dans une entreprise de moins de 21 salarié-e-s.

15. Le CCT de l’industrie graphique (art. 401, al. 3) étend la notion de licenciement collectif dès que 10% des salarié-e-s, mais au moins 3 personnes sont touchées par des problèmes économiques ou une fermeture d’entreprise. (pièce 5)

16. Malgré cela, il faut remarquer que Reliure SA n’a respecté ni le CO, ni le CCT en matière d’information et consultation des salarié-e-s, de l’Office cantonal de l’emploi et des interlocuteurs sociaux avant de prononcer les licenciements.

17. En effet ce n’est que le jour même de ces licenciements, que les services adhoc de l’Office cantonal de l’emploi et le syndicat comedia ont été informés de ce licenciement collectif par courrier de l’avocat de M. Muller, Maître Shahram Dini, daté du 18 décembre 2007 (pièce 6).

18. Les licenciements sont motivés par la fermeture de l’entreprise entraînée par « la concurrence étrangère et les nouvelles activités de reliure développées récemment par les imprimeurs ». (pièce 6)

19. Ce courrier promet la respect des obligations légales et contractuelles et informe que l’avocat et l’administrateur se tiennent à disposition pour la mise en place du plan social prévu à l’article 407 du CCT (pièce 5).

20. Par courrier du 20 décembre 2007, comedia informe Me Dini de sa venue dans l’entreprise le 9 janvier 2008 pour rencontrer l’ensemble du personnel et entamer la négociation du plan social. Comedia estime cependant que le respect de l’esprit du CCT aurait dû amener la Reliure SA à informer le syndicats avant de prononcer les licenciements pour étudier toutes les possibilités de sauvetage des emplois et négocier un plan social avant de prononcer les licenciements (pièce 7)

21. Le mercredi 8 janvier 2008, l’assemblée du personnel mandate deux représentant-e-s au côté de comedia pour négocier une priorité de vente des machines pour un projet venant de l’interne et qui prévoit le maintien en activité de dix personnes à Genève dans d’autres locaux. Les mêmes personnes sont mandatées pour un négocier un plan social qui dépasse les simples obligations légales et contractuelles.

22. Le même jour, une première séance de négociations se tient immédiatement après l’assemblée du personnel. Pierre Müller refuse d’entrer en matière sur une priorité et un délai pour le projet venant de l’interne. Il annonce au contraire sa volonté de vendre rapidement les machines au plus offrant et de fermer au plus vite l’entreprise si possible pour le 29 février.

23. Lors de la même négociation, les contours d’un plan social sont évoqués. Le syndicat comedia est chargé de soumettre une proposition écrite détaillée. Une nouvelle négociation est agendée pour le 17 janvier 2008.

24. Par courrier du 10 janvier 2008, comedia transmet à Me Dini un projet de plan social (pièces 8 et 9)

25. Le 17 janvier 2008, la deuxième séance de négociation aboutit à un double échec :

  • M. Muller refuse une nouvelle fois de donner une chance au projet interne de poursuite des activités et de maintien d’emplois, et annonce qu’il a trouvé un acheteur pour les machines qui lui versera Fr. 200’000.- le 25 janvier et les 250’000.- restant fin février ; il ajoute cependant que si David Harry peut mettre sur la table 200’000.- le 25 janvier et 250’000.- le 29 février, il pouvait encore le faire. Il accuse cependant M. Harry de maintenir de faux espoirs pour les salariés avec un projet qui relève du fantasme.
  • Concernant le plan social, les points dépassant les simples obligations légales et contractuelles sont systématiquement refusés par M. Muller et Me Dini. Par exemple, la proposition de pont AVS/LPP pour une dame à 11 mois de la retraite est refusé en ces termes par M. Muller : « il y a des assurances sociales pour ça ».

26. Dans le courant de la négociation, M. Muller agite la menace d’une mise en faillite si l’affaire est portée sur la place publique. Cependant il refuse formellement de mettre les comptes de l’entreprise à disposition du personnel et du syndicat pour vérifier cette menace de faillite imminente.

27. Suite à l’échec de ces négociations, l’assemblée du personnel mandate le syndicat comedia pour donner un dernier délai à la direction jusqu’au lundi 21 janvier pour faire des propositions concrètes. Comedia informe par courrier du 18 janvier Me Dini de ce délai. (pièce 10)

28. Par mail du vendredi 18 janvier 2008, Me Dini demande de reporter le délai pour une détermination écrite au jeudi 24 janvier. (pièce 11)

29. L’assemblée du personnel du 22 janvier 2008, constate qu’elle n’a reçu aucune réponse dans le premier délai imparti, mais accepte d’attendre une réponse pour le vendredi 25 janvier au plus tard.

30. Comedia confirme cela par écrit à Me Dini le mercredi 23 janvier et précise une série de points sur lesquels le personnel attend une réponse précise. (pièce 12)

31. Par courrier du 25 janvier 2008, Me Dini donne une fin de non recevoir aux demandes du personnel. Il remet même en question l’application du 2ème paragraphe de l’alinéa 1 de l’art. 405 du CCT sur lequel on était pourtant tomber d’accord auparavant et qui avait été respecté pour le délai de congé de certaines personnes. (pièce 13)

32. Comedia répond point par point à ce courrier le mardi 29 janvier 2008. (pièce 14)

33. Le 30 janvier 2008, GHI publiait un article sur Reliure SA en ne donnant la parole qu’à M. Muller. (pièce 15)

34. Le 31 janvier 2008, comedia publie un communiqué de presse. (pièce 16)

35. M. Muller rencontre une nouvelle fois comedia et une délégation du personnel ce 31 janvier. Il réaffirme qu’il n’a aucune proposition nouvelle et qu’il ne veut entrer en matière sur rien. Il informe cependant après moultes hésitations que le racheteur des machines est M. Theurel de Grafinter qui est un revendeur de machines d’occasion. (pièce 17)

36. Le 31 janvier 2008, la majorité du personnel présent donne mandat à comedia. Dans un premier temps, ce mandat vise à saisir la Chambre des relations collectives de travail en tant qu’organe de conciliation. (pièce 17 bis)

37. Le syndicat Comedia en informe M. Muller qui répond : « Alors la guerre est déclarée »

38. La directrice et le chef d’atelier apprennent que Grafinter n’a payé qu’un acompte de Fr. 150’000.- le 31 janvier (et non le 25 comme affirmé par Muller). Par téléphone, M. Theurel de Grafinter leur affirme que la suite de la somme sera versée en plusieurs mensualités et que M. Muller a mis une clause de non-revente en Suisse dans le contrat d’achat.

39. Le 6 février, Comedia saisit par recommandé la CRCT en tant qu’instance de conciliation avec une triple demande (compte – délai prioritaire pour vente des machines et plan social). (pièce 19)

40. Le 7 février 2008, la CRCT convoque une audience de conciliation pour le mardi 12 février 2008 à 10h15. (pièce 20)

41. Le 12 février, audience de conciliation à la CRCT, M. Muller est assisté par une avocate remplaçant Me Dini. 6 salarié-e-s licencié-e-s sont aux côtés de Comedia représenté par Pierre Djongandeke et Bernard Remion.

42. Comedia dépose en début de séance une demande complémentaire concernant le contrat de vente des machines et la question des 2 apprentis (pièce 21).

43. David Harry dépose des documents à l’appui de son projet de maintien des emplois et du savoir-faire à Genève : concernant le local qu’il a trouvé et des lettres d’appuis de plus de 10 imprimeries dont les 2 plus grandes de Genève : Atar et SRO-Kundig. (pièces 22 et 23) Neuf autres clients ont annoncés encore leur soutien.

44. Lors de cette « conciliation », M. Muller n’a voulu entrer en matière avec engagement sur rien. Il s’est contenté de vagues promesses, d’affirmations non vérifiées, et de refus :

  • on aurait trouvé une place pour les 2 apprentis (chez Atar et SRO-Kundig).
  • on aurait retrouvé des emplois pour tout le monde dès le 1er mars
  • sur suggestion du juge, il s’engage à fournir une document de la fiduciaire concernant la situation financière de l’entreprise
  • sur suggestion du juge, il s’engage à faire une proposition de pont AVS/LPP à Mme Ménetrey qui est à 1 an de sa retraite
  • il refuse de montrer le contrat de vente des machines mais jure qu’il n’y a aucune clause de non-revente en Suisse
  • il refuse d’entrer en matière sur un vrai plan social estimant qu’il a déjà fait plus que ses obligations contractuelles

45. Le juge estime qu’il est trop tard d’intervenir pour les machines puisqu’elles sont déjà vendues.

46. Le juge estime à plusieurs reprises que la question du respect de la procédure en cas de licenciement collectif peut réellement se poser vu les dispositions du CCT qui étendent celles du Code des Obligations. Il répète à plusieurs reprises que M. Muller aurait mieux fait de respecter la procédure du licenciement collectif.

47. La séance de conciliation se termine ainsi sans protocole de conciliation signé entre les parties.

48. Comedia et les salariés décident d’interpeler directement le Conseil d’Etat pour faire pression pour permettre la réalisation du projet de David Harry.

49. Comedia mandate l’Etude Waeber-Membrez-Bruchez pour étudier la possibilité de saisir la CRCT pour non respect du CO et du CCT en matière de licenciement collectif et de transfert/vente d’entreprise.