Communauté genevoise d’action syndicale

Organisation faitière regroupant l’ensemble des syndicats de la République et canton de Genève

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Communiqué de presse

concernant les trois personnes incarcérées arbitrairement suite aux événements du 22 avril 2018 dans les hautes-alpes

dimanche 22 avril 2018

Ce samedi 21 avril des militants du groupuscule Génération Identitaire se sont rendus au Col de l’Échelle dans les Alpes françaises pour y mener une nouvelle action anti-migrant·e·s avec pour objectif de bloquer l’entrée du territoire français. Ils y ont aussi déposé une gigantesque banderole portant un message xénophobe.

Le lendemain, côté italien, plusieurs personnes initialement rassemblées pour une rencontre-débat sur la thématique des frontières ont pris l’initiative spontanée d’un déplacement solidaire avec une trentaine de personnes en exil afin de traverser la frontière jusqu’à Briançon, et ce, en réponse au durcissement du contrôle des frontières franco-italiennes et au déploiement de haine et de racisme de la part d’un mouvement fascisant la veille.

Dans la soirée, à Briançon, 6 personnes ont été aléatoirement arrêtées et placées en garde à vue sous le chef d’accusation d’avoir permis l’entrée d’étranger·ère·s en situation irrégulière en Franceet ce en bande organisée. Ces arrestations très choquantes peuvent engendrer jusqu’à 10 ans de prison, 750 000 euros d’amende et l’interdiction d’entrer sur le territoire français.

Théo, Bastien et Eleonora sont encore en détention provisoire à Marseille à la prison des Baumettes en attente de procès qui se déroulera fin mai.

À l’inverse, les groupes d’extrème droite qui s’érigent en milice de défense de l’État ne semblent pas inquiéter le gouvernement qui, à aucun moment, n’entend prendre des mesures à leur encontre. Il en devient ainsi complice.
Depuis plusieurs années déjà, on assiste à une montée de l’extrême droite dans toute l’Europe et avec elle la légitimation d’actions telles que celle de ce samedi. Plus préoccupant encore, les autorités en place semblent aller dans le même sens en mettant en place des politiques qui criminalisent les personnes en exil, par exemple en empêchant la régularisation des personnes sans-papier.

Dans ce contexte, la France assume une position d’expulsion et de renvois systématiques et quand elle ne renvoie pas, elle enferme dans des camps comme à Calais ou ailleurs, dans des centres de détention administrative dans des conditions indignes et intolérables. Elle ne compte d’ailleurs plus le nombre de condamnations à ce sujet auprès de la Cour européenne des droits de l’Homme.

Histoire d’en rajouter une couche, ce dimanche, un projet de loi asile-immigration est passé en première lecture à l’Assemblée Nationale. Ce projet vise à augmenter le nombre d’expulsions de personnes en situation d’exil et donne la possibilité de mettre en détention des personnes mineures. De plus, nombre d’associations dont la Cimade et Amnesty International relèvent déjà la répression disproportionnée envers « les actes de solidarité n’ayant pas de contrepartie lucrative" plus connus sous le nom de "délit de solidarité ».

C’est dans ce contexte européen et français, de montée de l’extrême droite et de politiques de criminalisation des personnes en situation d’exil, que des actes visant à fermer les frontières symboliquement sont pris au sérieux et même soutenus. La réaction des pouvoirs français est d’une extrême partialité, disproportionnée et profondément contraire à toute égalité de traitement. Comment se fait-il que sur les deux groupes mobilisés l’un passe pour pacifique et l’autre subisse une répression aveugle ? Comment légitimer une répression telle à l’égard de trois personnes alors que c’est bien une question de société qui est en jeu ? Celle de savoir si l’État français remplit toujours son rôle de fondateur du projet européen ayant pour fondements la libre circulation des personnes, le respect et la promotion des droits humains, la liberté, l’égalité, la fraternité ?

Le système pénal français s’ancre dans des logiques structurelles profondément racistes et xénophobes. Plus encore, et cette affaire nous le démontre bien, il ne garantit même pas les droits procéduraux aux personnes arbitrairement arrêtées ce week-end.

Nul besoin ici de rappeler à combien d’égards la procédure de comparution immédiate constitue une atteinte aux droits les plus fondamentaux et notamment celui de droit à la défense du ou de la prévenue.

La mise en détention préventive des trois personnes jusqu’à fin mai alors qu’aucune enquête contradictoire n’a pu être menée, montre bien la volonté de faire taire toute tentative de contestation et de mobilisation les concernant et même pire, de faire peur à celles et ceux qui souhaiterait à leur tour manifester leur opposition aux groupuscules d’extrême droite, jouissant eux d’une impunité notoire.

L’audience de mardi sous surveillance policière et le transfert de deux d’entre eux de Gap à Marseille jeudi 26 avril en réaction aux mobilisations de soutien montrent bien la peur qu’ont les pouvoirs publics de voir cette affaire se décliner en procès politique.
C’est pourquoi nous appelons aujourd’hui, depuis une coordination de soutien, les pouvoirs politiques suisses à réagir et à faire pression sur l’État français pour la libération de deux de ses ressortissants incarcérés.

Pour des politiques d’accueil humaines et dignes

Pour la solidarité internationale et le soutien inconditionnel aux personnes en situation d’exil

Pour leur libération conditionnelle et leur retour en Suisse

Le comité de soutien aux trois de Briançon