Communauté genevoise d’action syndicale

Organisation faitière regroupant l’ensemble des syndicats de la République et canton de Genève

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150e anniversaire du 1er congrès de la Première internationale = une promenade historique commentée sur les lieux de mémoire ouvrière de Genève

mardi 20 septembre 2016 par Claude REYMOND

il y a 150 ans, en septembre 1866, se tenait à Genève le 1er congrès de l’Association internationale des travailleurs, plus connue sous le nom de Première internationale.

Une commémoration a été organisée par des personnes issues des organisations du mouvement ouvrier genevois et nous vous invitons à la promenade historique commentée sur les lieux de mémoire ouvrière de Genève samedi 24 septembre 2016, de 10h00 à 13h00.

Rendez-vous à l’entrée principale du cimetière Saint-Georges, vers les fleuristes (arrêt cimetière du bus 2).

La promenade se termine dans le quartier de Plainpalais.


(En cas de mauvais temps, la promenade sera renvoyée d’une semaine au samedi suivant 1er octobre).


Rapport final relatif à la commémoration du 150e anniversaire du Congrès de Genève de l’AIT envoyé à la Ville de Genève, comprenant la revue de presse, bien fournie et très positive. Etabli pour le comité d’organisation par Georges Tissot et Patrick Auderset.

PDF - 3.4 Mo
2016-11-18georgestissot_patrickauderset_150eait_rapport.pdf
PS:

On ira voir notamment


Monument commémoratif du 9 novembre 1932
Plaine de Plainpalais, Genève
Un mémorial pour se souvenir, pour rendre hommage, mais de quoi, à qui ?
1932 est une année funeste !
La crise économique née du krach de 1929 frappe maintenant durement Genève. Plus de 8 000 chômeurs, dont les trois quarts n’ont droit à aucune indemnisation. De nombreuses victimes de la crise sont expulsées de leur logement, avec saisie des meubles.
Simultanément, Genève connaît plusieurs scandales financiers, commis par des membres de la bourgeoisie locale.
Le parti socialiste est le premier parti du canton (37 députés au Grand conseil), mais ne compte aucun membre à l’exécutif.
Le fascisme monte en Europe. Mussolini est au pouvoir depuis dix ans en Italie. Salazar prend le pouvoir au Portugal, le parti nazi obtient 37,4 % des suffrages lors des élections législatives allemandes.
À Genève, un parti fasciste, l’Union nationale naît en 1932, et multiplie les provocations, en particulier contre les leaders de gauche, les Juifs, les étrangers et les confédérés.
Au début du mois de novembre 1932, l’Union nationale organise une “Mise en accusation publique des sieurs Nicole et Dicker”, responsables du Parti socialiste, régulièrement insultés dans les écrits de l’UN (“L’immonde Nicoulaz, le juif Dicker et leur clique…).
Une contre-manifestation est organisée par la gauche politique et syndicale le 9 novembre, soir du “procès” mis sur pied par l’UN.
Malgré le caractère fasciste du parti organisateur et de sa manifestation, le Conseil d’État décide de protéger la salle où aura lieu le meeting, et fait appeler l’armée.
Environ 5 000 manifestants se dirigent vers la salle communale de Plainpalais, où sont réunis les fascistes. Une chaîne tendue au travers de la rue qui y mène cède, ce qui amène le Conseiller d’État à demander l’intervention de la troupe. Dès cet instant, tout se déroulera en vingt minutes. Mal positionnée, une compagnie de recrues tente de remonter par l’arrière, à travers la manifestation par les trottoirs latéraux. Les soldats, isolés en colonne par un, sont bousculés par les manifestants qu’ils veulent dépasser, et font vite demi-tour.
Ils reculent et vont s’adosser contre la façade du Palais des expositions, où ils font face à environ 150 personnes désarmées (aucune arme n’a été trouvée sur aucun manifestant). Mal préparés, inexpérimentés, privés des renforts requis qui n’ont pas compris les ordres reçus, les soldats et leurs cadres paniquent et font feu.
Au fusil, au fusil-mitrailleur, au pistolet, 147 balles sont tirées dans le tas, au travers de la place, faisant 13 morts et plus de 65 blessés, pour la plupart des passants et des curieux, presque tous touchés dans le dos.
Six mois plus tard s’ouvre le procès des responsables du massacre… Les provocateurs fascistes ? Les militaires ? Les autorités politiques ? Non ! Sont jugés les organisateurs de la contre-manifestation et quelques manifestants cueillis au hasard, en tout 18 personnes dont 11 seront acquittées.
Léon Nicole sera lui condamné à 6 mois de prison, et sortira juste assez tôt pour être élu au Conseil d’État, dont il devient le président.
Liste des victimes
• Melchior Allemann, 31 ans, employé d’hôtel et militant socialiste ;
• Hans Brugger, 28 ans ;
• Albert Francis Clerc, 54 ans, fraiseur dont le fils faisait partie des recrues ;
• Henri Fürst, 38 ans, mécanicien et président du Parti communiste genevois, tué de deux balles dans la tête, alors qu’il appelait les soldats à ne pas tirer sur leurs frères ;
• Émile Guignet, 27 ans ;
• Émile Henry, 55 ans, batelier ;
• Edmond Junod, 29 ans, mécanicien ;
• Alphonse Kolly, 41 ans, colporteur ;
• Jean-Pierre Larderaz, 23 ans, employé de commerce ;
• Gabriel Loup, 57 ans, maître boulanger ;
• Oscar Maurer, 25 ans, employé de banque tué alors qu’il sortait des cours du soir ;
• Édouard Quillet, 34 ans, employé à l’Armée du salut ;
• Marius Rattaz, 36 ans, régent principal à Chêne-Bourg, mort le 14 novembre des suites de ses blessures.
Victimes des provocations fascistes, de la répression anti-ouvrière et du militarisme !
Chaque année, le 9 novembre, un hommage est rendu aux victimes et le massacre est commémoré pour q’on ne l’oublie pas, pour que jamais de tels faits ne se reproduisent.
En 1982, un comité très large, réunissant toutes les composantes de la gauche genevoise, organisa divers évènements pour marquer le 50ème anniversaire du massacre. Décidé à ériger un monument commémoratif, le comité en sollicita le financement auprès du Conseil administratif de la Ville de Genève. Ce dernier a cependant refusé, estimant qu’il ne lui appartient pas “d’assumer le risque d’affrontement que l’on peut craindre”.
C’est ainsi qu’un jour de début novembre 1982, vers midi, un rocher d’environ cinq tonnes a été posé par un camion sur la plaine de Plainpalais, très proche du lieu de la fusillade.
Des militants de la FOBB, le syndicat des travailleurs de la construction, se sont chargés de dresser le monument ! Ils ont prélevé une pierre destinée à servir de digue au fond du lac de Verbois, pour guider les alluvions vers la sortie du barrage, et l’ont transportée jusqu’à son lieu de mémoire.
Une plaque est apposée sur la Pierre, où on peut lire l’inscription “Aux victimes du fascisme à Genève, 9.11.1932 – 9.11.1982”. Un écriteau est posé à terre devant la Pierre, avec cette citation de Berthold Brecht “Le ventre est encore fécond, d’où a surgi la bête immonde”.
Peu de temps après sa pose, le monument a été l’objet d’une tentative de renversement, commise et ratée nuitamment par un militant d’extrême droite, membre du parti Vigilance et instructeur de la protection civile, muni d’un véhicule 4X4. Il a été perturbé dans sa tentative par le plus jeune député du Grand conseil, qui rentrait chez lui au sortir d’une réunion.
La plaque a été plus tard enlevée et remplacée par un “plat” aménagé sur la Pierre, où est gravée l’inscription que l’on trouvait sur la banderole de tête du cortège du 50ème anniversaire, “Aux victimes du 9 novembre 1932, plus jamais ça”. Il s’agit probablement du résultat d’une négociation qui a abouti au maintien du mémorial sur la plaine, avec l’accord de la Ville et du Conseil d’État.
Au dos de la Pierre, depuis le début des années 2000, est apposée une plaque d’aluminium, sur laquelle figure le texte suivant :
“Ici même, le 9 novembre 1932, l’armée suisse tire sans sommation sur des manifestants qui protestent contre la tenue d’un meeting fasciste, tuant 30 personnes et en blessant 65 autres.
Suite au rejet d’une initiative fiscale genevoise visant à protéger les revenus des petits contribuables, les sympathisants de l’autoritarisme antidémocratiques convoquent une assemblée pour mettre en accusation publique les dirigeants de la gauche ; cette dernière appelle à une contre-manifestation.
Le gouvernement genevois sollicite l’armée qui met à disposition les effectifs d’une école de recrue “afin de coopérer à l’action de la police en vue du maintien de l’ordre”. On dit aux soldats que la révolution a éclaté à Genève ; sur les 600, quatre refusent la mission.
Cette pierre fut posée 50 ans après et cette plaque payée par souscription publique sous l’égide du Comité d’organisation des manifestations du 1er mai.”

En 2006, a été scellée dans la Pierre la lanterne de la Promesse. Les autorités de la Ville et du Canton, le Comité pour le souvenir du 9 novembre en détiennent une clé, de façon à pouvoir en allumer la flamme et la protéger.
En 2008, le Conseil d’État a accepté le déplacement de la Pierre à l’endroit exact d’où sont partis les coups de feu (déplacement de 100 mètres), de l’autre côté du boulevard Carl-Vogt, sur le parvis de l’Université. Alléguant du poids trop élevé de la pierre, le rectorat de l’Université s’y est opposé.
La Pierre est le lieu de fréquentes manifestations populaires, en particulier chaque année de la manifestation du 1er mai et de la commémoration du 9 novembre.

Jacques ROBERT, Meyrin, 23 septembre 2016