Communauté genevoise d’action syndicale

Organisation faitière regroupant l’ensemble des syndicats de la République et canton de Genève

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Pour la défense des libertés syndicales et du droit de grève

mardi 22 septembre 2015 par Claude REYMOND
Au Président du gouvernement d’Espagne Monsieur Mariano Rajoy
par les bons soins de son ambassadrice auprès de la mission permanente auprès des Nations Unies à Genève
et de Monsieur Diego CANO, représentant auprès de l’OIT

22/09/2015

Pour la défense des libertés syndicales et du droit de grève
Pour l’abrogation de la loi-bâillon
Pour l’abandon de toutes les poursuites et non-lieu pour tous les cas
Pour l’abrogation de l’article 315.3 du Code pénal

Monsieur le Président du gouvernement d’Espagne
et Monsieur le Ministre de l’Intérieur,

Ces dernières années dans votre pays nous constatons une augmentation des entraves aux droits fondamentaux qui, notamment, remet en cause la liberté d’expression ainsi que le droit de manifestation consacré dans la Constitution espagnole.
Actuellement, plus de trois cents militants et responsables syndicaux sont victimes de cette répression. Plusieurs dizaines d’entre eux ont d’ores et déjà été condamnés à de lourdes peines de prison, lesquelles furent requises contre eux aux termes de l’article 315.3 du Code pénal, celui qui permet aux procureurs généraux et aux juges d’inculper et de condamner à des peines de prison des travailleurs et travailleuses pour l’organisation et la participation à des grèves légales.
L’article 315.3, « arme de classe » puisqu’uniquement utilisée contre les salariés et que jamais un-e chef-fe d’entreprise ne sera condamné au titre de cet article, stipule que : « Des peines de prison de six mois à trois ans assorties d’une amende, et de six à douze mois seront infligées à tous ceux qui, agissant en groupe, ou individuellement mais en accord avec d’autres, exerceront des pressions sur d’autres personnes afin de commencer ou de poursuivre une grève ».
La nouvelle Loi de Sécurité citoyenne, dont le ministère de l’Intérieur est à l’origine, constitue un net recul social, un anachronisme constitutionnel, ainsi qu’une atteinte claire et nette aux droits démocratiques.
Non seulement elle maintient les condamnations antérieures pour participation à des manifestations organisées sans préavis, mais de plus, elle porte le montant maximum de l’amende à 600 €, et crée une nouvelle infraction beaucoup plus grave assortie d’amendes pouvant aller jusqu’à 600 000 € pour quiconque manifeste sans préavis dans des bâtiments publics ou aux alentours de services publics.

De la même manière, ce dispositif législatif considère que ceux qui ont appelé ou organisé une manifestation sont responsables des dommages causés ainsi que des infractions commises. Ainsi la plupart des infractions répertoriées sur la liste du projet de la Loi de Sécurité citoyenne visent à restreindre les droits de réunion et de manifestation.
Aux termes de cette loi, nombre des mobilisations auxquelles ont participé différents collectifs, associations, organisations syndicales etc., seraient illégales et donc susceptibles de donner lieu à répression et des sanctions financières.
Dans la pratique cela implique de réprimer toute participation à des actions contre des expulsions, à des rassemblements spontanés, comme ceux qui sont organisés par des travailleurs lors d’un conflit du travail ou pour libération de personnes arrêtées lors d’une grève générale, à réprimer les sit-in comme ceux du 15-Mai, ou le fait de placer une pancarte sur un édifice public…

Nous voulons rappeler que

  • l’ONU soutient et préconise que « les organisateurs de manifestations de protestation ne doivent pas être soumis à des amendes ou à des peines de prison pour ne pas les avoir notifiées préalablement aux autorités ». De même, le Tribunal européen des droits de l’homme (TEDH) a déclaré également que « la liberté de participer à une réunion pacifique est d’une telle importance qu’une personne ne peut être l’objet d’une sanction - y compris des plus légères dans l’échelle des sanctions disciplinaires - pour sa participation à une manifestation qui n’a pas été interdite, à la condition que cette personne n’ait pas commis d’acte répréhensible à cette occasion » ;
  • les fonctionnaires de l’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) ont rédigé un rapport où il est dit que l’ensemble des considérants (de la loi en question) ne répond pas aux standards internationaux. Ils affirment qu’il est « particulièrement préoccupant que les organisateurs de réunions organisées sans préavis puissent être victimes de peines particulièrement dures, indépendamment du caractère pacifique des protestations ou de l’absence de perturbations de l’ordre public ». À leur avis, cette pratique « peut être utilisée pour limiter indûment l’exercice du droit à la libre réunion pacifique ». « Dans ce contexte », poursuivent-ils, « le caractère discrétionnaire des possibilités permettant que des personnes soient considérées comme organisatrices de protestations en Espagne est particulièrement problématique ».

Sont incluses dans la loi différentes infractions et amendes destinées à punir et réprimer les nouvelles formes de mobilisation et de protestation citoyenne. De toute évidence, cette loi escompte un effet dissuasif important sur les personnes qui désirent légitimement exercer leurs libertés fondamentales.

En Espagne, de nombreux dirigeants et militants de l’UGT, des CCOO et d’autres organisations syndicales sont mobilisés contre cette véritable machine de guerre antisyndicale : ils exigent à juste titre l’abrogation de cet article.

Répondant à l’appel de nos camarades de l’UGT de Catalogne, nous nous déclarons solidaires de tous les militants ouvriers et des syndicalistes espagnols actuellement poursuivis, dénoncés, condamnés et amendés en application de la ‘‘Loi de protection de la sécurité citoyenne’’.

Nous comprenons parfaitement qu’ils rejettent la ‘‘Loi de protection de la sécurité citoyenne’’ (l’article 315 alinéa 3 du Code pénal ) - approuvée par le gouvernement et le plénum du congrès.

Aussi, nous demandons tant l’annulation des procès contre les 300 syndicalistes accusés d’avoir participé à des grèves générales ces dernières années que l’abrogation de l’article 315.3 du Code pénal.

Différentes démarches ont été entreprises en ce sens dans plusieurs pays dont nous sommes solidaires : la défense du droit de grève et d’organisation est portée par les travailleurs de tous les pays.

Pour conclure, nous ne pensons pas vain de rappeler la décision du 17 novembre 1947 de l’Assemblée générale des Nations Unies (Déclaration de Philadelphie) qui a considéré que la liberté syndicale d’association, droit inaliénable, est, ainsi que d’autres garanties sociales, essentielle à l’amélioration de la vie des travailleurs et à leur bien-être économique.

http://www.cgas.ch/SPIP/spip.php?article2076

Madame l’Ambassadrice, Excellence, nous vous remercions d’informer de cette position Monsieur le Président du gouvernement de l’Espagne et Monsieur le Ministre de l’Intérieur.


De : Albert Anor
Objet : Rép : délégation Mission espagnole
Date : 4 mars 2016 22:21:05 UTC+1
À : Secretariat CGAS

...les premiers jugés (travailleurs d’Airbus) ont été relaxés sans aucune condamnation, le dossier à été classé. Il s’agit donc d’une première victoire de la mobilisation et de la solidarité internationale...


PS:

CAMPAGNE INTERNATIONALE DE SOLIDARITE AVEC LES TRAVAILLEURS ET MILITANTS ESPAGNOLS POURSUIVIS POUR FAIT DE GREVE

BREF COMPTE RENDU DE LA DELEGATION DU MARDI 22 SEPTEMBRE 2015 A LA MISSION D’ESPAGNE AUPRES DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES A GENEVE.

La délégation de la Communauté genevoise d’action syndicale (CGAS) était composée de Claude Reymond secrétaire de la CGAS (en remplacement de la présidente Manuela Cattani empêchée de venir), de Umberto Bandiera, président de la commission internationale de la CGAS et secrétaire du syndicat UNIA et d’Albert Anor, membre du comité directeur du Syndicat des Services Publics (SSP-VPOD).

La délégation a rencontré M. Diego Cano représentant de la Mission auprès de l’OIT, mandaté par l’Ambassadrice Mme Ana-Maria Menendez.

Les membres de la délégation ont brièvement présenté les raisons de leur démarche dans le cadre de la campagne de solidarité avec les quelque 300 syndicalistes espagnols pour suivis par la justice espagnole pour avoir fait usage du droit de grève et a terminé son plaidoyer en présentant à M. D. Cano la lettre adressée par la CGAS au premier ministre espagnol Mariano Rajoy pour qu’elle lui soit transmise par le soins de la Mission.

À la très grande surprise de la délégation M. D. Cano a déclaré, au nom de l’Ambassadrice, qu’il n’était pas habilité à recevoir cette lettre pour la transmettre au premier ministre. Son statut ne l’autorise pas à avoir des relations bilatérales avec les syndicats suisses.

À la question : « à qui pouvons-nous remettre cette lettre ? », M. D. Cano a répondu que l’Ambassadrice ne lui a donné aucune instruction à ce sujet et qu’il ne pouvait pas nous répondre.

La délégation à fait part de son grand étonnement, compte tenu des expériences en la matière, et de son mécontentement face à cette réponse de non-recevoir inédite et totalement en contraste avec les pratiques usuelles.

La délégation a délibéré à l’issue de cette rencontre et a décidé d’informer les contacts syndicaux en Espagne pour connaître leur avis sur la suite à donner à cette affaire et de se concerter pour décider de la forme d’une réaction publique de la CGAS.

pv. AA 25.09.15