Communauté genevoise d’action syndicale

Organisation faitière regroupant l’ensemble des syndicats de la République et canton de Genève

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Après le 9 février, nous devons reprendre l’offensive syndicale

lundi 6 octobre 2014

C’est une femme qui,
pour la première fois,
préside la faîtière syndicale.
Manuela Cattani parle
du 9 février et de la suite

Erlc Budry de la Tribune de Genève, paru le 06-10-2014


Manuela Cattani est secrétaire générale du Syndicat interprofessionnel des travailleurs (SIT). Depuis le 4 septembre, elle est également présidente de la Communauté genevoise d’action syndicale (CGAS), la faîtière des syndicats genevois.

Si son élection à cette fonction n’est pas une surprise (elle était jusque-là vice-présidente), il aura tout de même fallu attendre 62 ans pour qu’une femme tienne ce rôle dans le monde syndical genevois.


Manuela Cattanl, est-ce pour vous important qu’une femme préside la CGAS ?

Nous avons à Genève des syndicats qui sont à la pointe de la lutte en faveur de l’égalité, mais il a quand même fallu attendre 2014 pour que cela arrive ... En réalité, cela me semble naturel et logique que des femmes aient leur place au comité de la faîtière. Ce qui m’importe, c’est de rendre service à la cause de la défense des travailleurs.

Quel est le rôle de la présidence ?

A l’interne, il s’agit de garantir l’unité, de permettre à chaque membre de la CGAS de pouvoir exprimer sa sensibilité. Mais c’est un travail collectif. Vis-à-vis de l’extérieur, la présidence assume le rôle de porte-parole, notamment face aux médias, en ce qui concerne les sujets syndicaux transversaux.

Quels sont les principaux dossiers qui occuperont les syndicats ces prochains mois ?

Il faut tout d’abord parler du cadre général. L’acceptation le 9 février de l’initiative de l’UDC « Contre l’immigration de masse » a tout modifié. Notre inquiétude, c’est de constater qu’une partie des travailleurs et des milieux populaires a suivi les discours des milieux populistes et xénophobes. Nous devons revoir tous nos fondamentaux et reprendre l’offensive syndicale. En commençant par mener campagne contre la très dangereuse initiative Ecopop, qui sera soumise au peuple le 30 novembre. L’économie peut peut-être s’accommoder de l’initiative UDC ou d’Ecopop, mais pas les travailleurs. Migrants, frontaliers ou Suisses, les salariés doivent avoir des droits et les mêmes conditions de travail et de salaire. Les discriminations ne profitent qu’au patronat. C’est ce discours que nous voulons imposer maintenant dans le débat.

De quelle manière ?

En dénonçant les abus patronaux et la sous-enchère salariale, en luttant pour le maintien et le développement des mesures d’accompagnement, en augmentant les sanctions contre les employeurs abusifs. Et aussi en exigeant un changement de cap sur le plan de l’emploi et de la lutte contre le chômage, comme le propose le projet de loi en matière d’emploi et de chômage que nous avons déposé devant le Grand Conseil avec les partis de gauche.

Que propose-t-il ?

Il s’articule en trois volets. Tout d’abord un programme cantonal de création de vrais emplois d’utilité publique, qui remplaceraient les emplois de solidarité. Car la meilleure manière de combattre le chômage reste de créer de l’emploi. Un deuxième volet propose un soutien personnalisé à la recherche d’emploi assorti d’une compensation financière, ainsi que le droit à la formation. Quant au troisième volet, il demande au Conseil d’Etat de prendre langue avec Berne afin que les travailleurs frontaliers puissent toucher les indemnités chômage en Suisse.

Quels sont vos arguments pour demander cela ?

Les frontaliers paient leurs cotisations chômage en Suisse, mais ne peuvent bénéficier des prestations s’ils perdent leur travail à Genève.

Sans parler des impôts qu’ils versent ici, même si une partie est ristournée à la France. Le but est aussi de renverser l’image du frontalier profiteur en relevant les richesses qu’ils apportent au canton. Nous voulons aussi par ce biais questionner les accords bilatéraux pour lesquels seul le lieu de résidence compte. A Genève, cela n’a plus beaucoup de sens.

Ne craignez-vous pas de faire le lit du MCG et de l’UDC avec cette proposition ?

Je pense que le risque politique le plus grand serait de laisser ces deux partis continuer sans résister. Là, nous avons choisi de poser les termes du débat autrement. Genève ne fait pas qu’exporter sa crise du logement, il exporte aussi son chômage en France voisine.

Il y a eu le 9 février, mals aussi le 18 mai, où l’initiative syndicale en faveur d’un revenu minimum a été balayée. Comment avez-vous digéré cette défaite ?

Oui on a perdu le 18 mai. Mais, lors de la campagne, les patrons n’ont cessé de répéter que l’initiative allait tuer le partenariat social. Et aucun n’a prétendu qu’il était décent de vivre à Genève avec moins de 4000 francs. Nous allons donc les prendre au mot. Nous passons par le partenariat social pour demander à l’Union des associations patronales qu’il n’y ait plus aucune convention collective ou contrat-type de travail qui prévoit de salaire minimum au-dessous 4000 francs.

Quels sont les autres grands enjeux pour la CGAS ?

Nous attendons que le Grand Conseil reprenne le traitement de notre initiative sur le renforcement du contrôle des entreprises. Le Tribunal fédéral n’a invalidé que la désignation par les seuls syndicats de l’inspection des entreprises que nous demandons. Enfin, nous songeons à proposer à l’Union syndicale suisse le lancement d’une initiative sur la protection contre les licenciements.