Communauté genevoise d’action syndicale

Organisation faitière regroupant l’ensemble des syndicats de la République et canton de Genève

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Fête du 1er août 2006 - Parc des Bastions

Allocution de M. André Hédiger

dimanche 24 septembre 2006 par Claude REYMOND

Mesdames, Messieurs,
Chères concitoyennes, chers concitoyens,

Le texte du Pacte fédéral de 1291 nous parle de démocratie, de solidarité et de justice. Mais que représentent aujourd’hui ces trois mots dans la réalité politique et sociale de la Suisse et de Genève ?

Si Genève est depuis 1815 un canton suisse, son histoire l’a conduite à se tourner très tôt vers les échanges transfrontaliers et vers l’Europe. C’est aujourd’hui une ville multiculturelle, siège de très nombreuses organisations internationales, où se côtoient plus de 180 nationalités. Et il va de soi que cet intense développement des relations extérieures n’exclut nullement un réel intérêt pour toutes les problématiques qui se situent au plan national. Qu’il s’agisse d’être solidaire des sans-emploi, des requérants d’asile ou des minorités ethniques, ce sont toujours les mêmes valeurs qui sont au premier plan : la justice, la démocratie et les droits de l’homme au sens le plus large.

Parmi les droits dont devrait bénéficier tout être humain, il faut citer le droit à l’emploi, au même titre que le droit à la nourriture, au logement et à la liberté d’opinion. Car le travail procure à chacun un sentiment de dignité et d’utilité qui contribue largement à la cohésion sociale. Or, selon les récentes statistiques, si le chômage est en régression en Suisse, cette amélioration reste inégale en fonction des cantons et des régions. En effet, malgré les efforts des autorités politiques, des syndicats et des citoyens, Genève reste malheureusement largement touchée par le chômage, comme d’autres cantons romands dont notamment le Jura.

Vous connaissez tous sans doute le cas de l’entreprise La Boillat à Reconvilliers, puisque ce conflit a été très largement médiatisé. Bien au-delà de la région jurassienne, la situation des travailleurs de Reconvilliers a suscité une vague de solidarité dans toute la Suisse, en particulier dans les milieux syndicaux. Malgré les nombreux processus de négociation mis en œuvre par les syndicats et le patronat, aucune solution optimale n’a malheureusement pu être trouvée. On peut amèrement regretter que cette entreprise spécialisée dans la micro-mécanique, et notamment la fabrication des fameuses pointes "Bic", soit en passe de cesser toute activité. En effet, nombre d’employés de La Boillat ont perdu leur travail, donc leur source de revenu, et la région jurassienne est désormais affaiblie par la perte d’un précieux capital économique et humain.

Le cas de La Boillat est emblématique du drame économique et social causé par de trop nombreuses restructurations et c’est sans doute pourquoi elle a suscité un si large mouvement de solidarité qui s’est d’ailleurs étendu jusqu’à Genève. A ce sujet, il faut relever l’intéressante démarche de la direction du Théâtre de Carouge qui a consisté à inviter les employés de La Boillat à venir assister à une représentation de la pièce de Michel Vinaver "Des travaux et des jours", qui présentait une similitude frappante avec leur situation. Dans la foulée, un film sur les ouvriers de La Boillat intitulé "La bourse ou la vie" a été réalisé par Jean-Charles Pellaud et Chantal Woodtli. Ce film sera projeté en première suisse ce soir même dans le parc des Bastions après le traditionnel feu de joie.

Cette Fête du 1er août 2006 coïncide avec un autre événement placé sous le signe de la solidarité, celui du traditionnel accueil à Genève du Groupe de travail des Nations Unies sur les peuples autochtones. En effet, cela fait aujourd’hui 24 ans que des délégations des peuples autochtones, c’est-à-dire les premiers peuples installés sur la terre, se réunissent dans notre ville sous l’égide de l’ONU.

Il faut saluer le grand pas en avant que constitue la toute récente approbation de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones par le nouveau Conseil des droits de l’homme, qui siège d’ailleurs à Genève depuis juin 2006. Ceci constitue un événement important dans la reconnaissance de ces minorités ethniques, qui représentent une grande richesse culturelle pour l’humanité, et qui sont trop souvent ignorées, niées, ou même persécutées et dont le mode de vie est menacé par notre civilisation. Je sais que de nombreux représentants des peuples autochtones sont présents ce soir et j’invite donc la population genevoise à venir les rencontrer en toute simplicité dans un esprit d’ouverture.

Avec plus de 180 nationalités qui se côtoient pacifiquement, notamment grâce aux activités sportives et culturelles, Genève constitue à l’évidence une ville cosmopolite. J’ai notamment le plaisir de saluer ce soir les membres de la communauté italienne, qui est l’invité d’honneur de cette Fête du 1er août 2006. La communauté italienne, qui est la seconde à Genève par le nombre de ses ressortissants, est aujourd’hui parfaitement intégrée à tous les niveaux. Depuis plusieurs décennies, ses membres ont largement contribué au développement économique, social et culturel de notre ville dont la tradition d’accueil des immigrants remonte à la Réforme.

C’est dans ce même esprit d’intégration que Genève a depuis peu accordé le droit de vote sur le plan communal aux étrangers résidant depuis plus de huit ans sur le territoire suisse, comme l’ont d’ailleurs fait d’autres cantons, comme le Jura, Neuchâtel, Vaud ou Appenzell Rhodes extérieures.

Il ne faut en aucun cas, Mesdames et Messieurs, altérer ce climat de cohésion sociale. C’est pourquoi le Conseil administratif de la Ville de Genève s’oppose fermement à la révision des lois sur l’asile et les étrangers, une révision sur laquelle le peuple suisse sera appelé à se prononcer le 24 septembre prochain. En effet, cette nouvelle loi sur l’asile, qui est d’ailleurs contraire aux engagements internationaux de la Suisse, et notamment à la Convention de Genève sur les réfugiés, porte clairement atteinte à la tradition humanitaire de Genève et de la Suisse, une tradition fondée sur l’accueil des ressortissants des pays qui ne respectent pas la démocratie ni les droits de l’homme. Quant à la nouvelle loi sur les étrangers, qui interdit quasiment aux non-Européens d’immigrer en Suisse, elle condamne ces derniers à la clandestinité et porte ainsi atteinte aux efforts d’intégration et au devoir de solidarité.

Or c’est bien ces valeurs d’ouverture, de solidarité et de cohésion sociale que j’appelle ce soir de mes vœux à l’occasion de la Fête nationale. Je vous remercie de votre attention et vous souhaite à toutes et à tous une excellente Fête du 1er août.