Communauté genevoise d’action syndicale

Organisation faitière regroupant l’ensemble des syndicats de la République et canton de Genève

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HORS-SOL

lundi 1er octobre 2012 par Claude REYMOND

C’est une étrange campagne à laquelle assistent les Genevois, qui doivent se prononcer le 14 octobre prochain sur un projet de nouvelle charte fondamentale. Issu d’une Assemblée constituante à nette majorité conservatrice, le texte divise pourtant principalement à gauche, au point que la droite semble, pour l’heure, se contenter de compter les points. Et les observateurs de s’étonner de l’agressivité de cer- taines prises de position.

A gauche, le piège était dressé dès le départ. Portée par quelques juristes sociaux-démocrates, l’idée de rédiger une nouvelle Constitution à froid, par en haut, en plein reflux du mouvement social, présentait un risque évident. Le Courrier en avait fait état, et le net succès de la droite à l’élection des constituants semblait confirmer l’augure.

Les premiers pas de cette assemblée, passablement âgée et masculine, n’ont fait qu’aviver les craintes. Forts de leur majorité, les groupes libéraux ont multiplié les provocations. Stratégie pour préparer la négociation finale ou appétit démesuré ? L’édifice menaçait, en tout état de cause, de s’écrouler. Au point qu’il fallut l’émergence d’un petit comité informel de constituants de droite et de centre-gauche pour négocier in extremis un consensus. Ultime pirouette bien peu démocratique, car réalisée hors enceinte ; à se demander à quoi ont servi les 15 millions de francs dé- pensés par l’auguste cénacle...

Au vu de ce tableau peu reluisant, le résultat soumis aujourd’hui au peuple est moins mauvais qu’on pouvait le craindre. Le texte est certes sans souffle et – plus grave – oublie 40% des habitants du canton qui n’ont toujours pas droit de cité, mais il consacre tout de même une série de droits sociaux et de principes importants pour les plus faibles. Genève ferait même œuvre de pionnier en matière environnementale, de droit des personnes handicapées, de respect des personnes homosexuelles et d’accès à la santé et à l’éducation.

Mais si la révolution néolibérale, initiée par les Barde, Dimier, Kunz et autre Hentsch, a fait long feu, elle a toutefois laissé une empreinte indélébile sur le texte final. Cette Constitution est émanation de notre temps ; le secteur privé s’y voit renforcé, alors que l’Etat, lui, sévèrement corseté, devra faire avec les moyens du bord. Pas de quoi garantir les droits proclamés plus haut.

Sur toute une série de domaines prioritaires – logement, fiscalité, services publics, énergie –, la majorité est parvenue à pousser le curseur vers la droite et à limer des garanties arrachées naguère dans la lutte.

Sur pas moins de huit pages spéciales, la rédaction du Courrier s’est attachée sans a priori à décortiquer ce texte, bien moins concis que nous l’avaient vanté ses initiateurs. Entre avancées et reculs, compléments heureux et définitions inquiétantes, cette Constitution n’est manifestement ni le brûlot néolibéral que d’aucuns dénoncent ni la charte progressiste proclamée par d’autres. Quel sort, dès lors, réserver à cet objet hétéroclite ?

Pour notre part, il ne nous paraît pas mériter qu’on lui sacrifie le texte actuel – produit d’un siècle et demi de luttes et d’histoire genevoises. A vous de juger.



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