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Erwin Sperisen nie en bloc

samedi 17 mai 2014

paru dans Le Courrier du 17-05-2014

Au deuxième jour de son procès devant le Tribunal cri-minel de Genève, Erwin Sperisen a donné hier l’image d’un ancien directeur général de la police nationale civile du Guatemala bien éloignée du chef tout-puissant. Le Suisso-Guatémaltèque de 43 ans, jugé pour dix assassinats, a tout fait, lors de son interrogatoire, pour minimiser son rôle à la tête de l’institution, qu’il a dirigée de juillet 2004 à mars 2007.

Selon Erwin Sperisen, l’intervention destinée à re- prendre en 2006 le contrôle de la prison de Pavon, près de Guatemala City, qui s’était soldée par la mort violente de sept détenus, aurait parfaitement pu se dérouler sans lui. « Je n’avais aucun rôle spécifique et j’avais délégué la partie opérationnelle à un subordonné », a relevé l’accusé.

La présidente du Tribunal criminel, Isabelle Cuendet, a alors demandé au prévenu pourquoi, s’il n’était pas opérationnel ce jour-là, il était armé jusqu’aux dents et avait enfilé un gilet pare-balles. Pour Erwin Sperisen, il s’agissait essentiellement d’une opération de communication. Il fallait impressionner la galerie.

« Notre image est très importante au Guatemala, notamment dans le cadre de notre lutte contre les narcotrafiquants », a souligné l’accusé. « On voit mal [la cheffe de la police genevoise] Mme Bonfanti aller à une opération vêtue de la sorte », a alors osé la prési- dente du tribunal, suscitant stupeur et moqueries du côté de la défense.
Outre l’opération de Pavon, au cours de laquelle sept détenus dérangeants auraient été froidement abattus par un es- cadron de la police, Erwin Sperisen est également accusé d’avoir ordonné ou supervisé par téléphone l’exécution sommaire, en 2005, de trois fugitifs qui venaient d’être retrouvés par les forces de l’ordre.

Dans cette affaire, également, Erwin Sperisen a nié toute responsabilité. Il a affirmé avoir pris connaissance des circons- tances de la mort de ces trois personnes en consultant le dossier à Genève. Erwin Sperisen a déclaré n’avoir pas été informé non plus d’une opération clandestine qui aurait consisté à exécuter, une fois repris, les prisonniers qui s’étaient échappés en 2005 du pénitencier « El Infiernito », et dont faisaient partie les trois fugitifs.

Ces réponses ont laissé per- plexe la présidente du tribunal criminel. « Ou bien vous êtes une marionnette manipulée par les politiciens et vous ne savez rien et ne comprenez rien, ou bien vous donnez des ordres et vous savez ce qui se passe au sein de la police que vous dirigez », a-t-elle lancé au prévenu.

Erwin Sperisen s’est défendu en affirmant qu’il lui était impossible humainement d’être informé de tout ce qui se passait et de tout superviser. « Je vous rappelle qu’il y avait à l’époque entre 4000 et 5000 homicides par année au Guatemala, sans compter les accidents et les affaires liées au trafic de drogue », a-t-il noté.

Le procès se poursuit lundi, avec la suite de l’interrogatoire d’Erwin Sperisen sur l’opération menée à la prison de Pavon. ATS



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