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Dure entame pour Sperisen et ses avocats

vendredi 16 mai 2014

paru dans Le Courrier du 16-05-2014

Le procès d’Erwin Sperisen s’est ouvert hier devant le Tribunal criminel de Genève. Le double national suisse et guatémaltèque est accusé d’avoir participé à l’assassinat de dix détenus en 2005 et 2006, alors qu’il était à la tête de la police nationale du Guatemala. Son interrogatoire a débuté dans l’après-midi. Le prévenu s’est montré brouillon quand les faits ont commencé à être abordés. Une attitude qui a eu le don d’agacer la présidente Isabelle Cuendet. « On a l’impression que vous jouez au chat et à la souris », lui a-t-elle lancé.

La présidente a souvent été obligée de s’y reprendre à plusieurs reprises pour obtenir des réponses claires. « On tourne autour du pot depuis trois quarts d’heure », s’est-elle exclamée. Le fait que l’accusé s’exprime en espagnol complique encore les débats.
Le dossier en lui-même est pourtant déjà très complexe. La cour s’est penchée sur l’organigramme de la police, afin de déterminer les rôles de chacun dans la chaîne de décision. Erwin Sperisen est accusé d’avoir ordonné d’abattre trois détenus qui s’étaient échappés avec d’autres prisonniers du pénitencier Infiernito en 2005. Un plan secret aurait été élaboré avec son consentement.

Sperisen est aussi soupçonné d’avoir participé à l’exécution de sept détenus lors de la reprise en main de la prison de Pavon en 2006. L’établissement était sous le contrôle des prisonniers et une opération clandestine aurait été décidée pour éliminer les détenus les plus influents.

Erwin Sperisen a expliqué pourquoi il avait quitté le Guatemala en 2007. « J’ai été la cible de plusieurs attentats après les actions que j’ai menées contre les narcotrafiquants. » Selon lui, des menaces ont également pesé sur ses enfants.
Avant d’entendre l’accusé, le tribunal a dû se pencher sur plusieurs requêtes de la défense, qui demandait que soient convoqués à la barre l’ancien président du Guatemala Oscar Berger et l’ex-directeur des Prisons Alejandro Giammattei.

Les avocats Florian Baier et Giorgio Campa ont aussi demandé l’audition du journaliste de L’Illustré Arnaud Bédat, dont un article publié mercredi affirmait qu’une plaignante – mère d’une des victimes de Pavon – n’aurait jamais entendu parler de son avocate genevoise, ni n’était consciente de porter plainte.

Un article qui a eu le don d’énerver le procureur Yves Bertossa, puisque la plaignante aurait dû rester anonyme pour garantir sa sécurité. María, c’est son prénom, a-t-elle subi des pressions lui ayant fait « perdre » la mémoire ? Tout porte à le croire après la diffusion, mercredi soir sur Léman Bleu, d’un film montrant la plaignante en discussion avec sa représentante légale. Le rush, tourné par deux cinéastes indépendants, ne laisse planer aucun doute sur les intentions de María vis- à-vis de la justice genevoise.

Au final, le Tribunal a rejeté les demandes de la défense. Aucune indication ne laisse à penser que la mère renonce à sa plainte, a-t-il souligné. Quant aux deux personnages politiques, n’ayant pas été des témoins directs des faits, ils n’auraient apporté aucun élé-ment nouveau, selon la Cour.

ATS/BPZ



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