Communauté genevoise d’action syndicale

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dans « La Société ingouvernable, une généalogie du libéralisme autoritaire »

Grégoire Chamayou décrit la contre-révolution néolibérale en cours

vendredi 1er mars 2019

Un jeune philosophe nous raconte comme un polar la contre-révolution néolibérale orchestrée par les économistes et politistes américains, pour enrayer la menace qu’ont fait peser les grèves de 1968 et des années 1970 aux États-Unis. Si plus aucun gouvernement n’« écoute » les manifestants, c’est parce que s’applique désormais une politique de « limitation » de la démocratie, pensée notamment par Friedrich Hayek (économiste austro-britannique), et qui est une mise à mort de la logique politique social-démocratique de l’État providence- qui fut la colonne vertébrale de la gauche parlementaire. Il faut « prendre toute la mesure » d’une contre- offensive destinée à « altérer radicalement les capacités de pen- ser et les manières d’agir, à un niveau anthropologique ».

La solution prônée par Hayek

Le verrouillage de toute protestation démocratique a lieu à plusieurs niveaux : mise en place d’un fédéralisme supranational constitutionnalisant l’interdiction de la répartition des richesses et la régulation des marchés par la dépense publique ; division arbitraire des territoires en régions contraintes de sous-traiter (privatiser) tous les services quand elles ne les suppriment pas ; mise sous tutelle des États nationaux par la spéculation sur leur endettement ; micro-privatisations rampantes, aussi insidieuses que généralisées (l’énergie, les transports, et bientôt les hôpitaux et les écoles) ; insé- curité sociale organisée par la précarisation ; affaiblissement des syndicats ; culpabilisation des acteurs (« c’est vous qui pol- luez »). Le cynisme (de Macron) ira jusqu’à augmenter la pression fiscale sur les plus pauvres tandis que celle des ultra- riches est allégée, et camoufle l’augmentation (structurelle) d’un bien de première nécessité, l’essence, en « taxe écologique », qu’on fait mine ensuite de supprimer pour les seuls entrepreneurs routiers.
Les gouvernants « fondés de pouvoir du capital », détournent la légitime colère populaire contre le capitalisme en émeutes contre les taxes (écologistes !), se heurtant aux « caisses vides » d’un État préalablement démantelé, et de transports publics non polluants brisés. Le seul horizon politique de ces émeutes, garanti par le légalisme constitutionnel de la gauche et des syndicats, est le coup de force fasciste. Lequel est d’ailleurs, au Brésil aujourd’hui, au Chili hier, la « solution » politique alternative prônée depuis longtemps par Hayek. Puisse ce livre aider à notre, urgente, contre-offensive intellectuelle. n

PS:

Pascale Fautrier
Paru dans L’Humanité
Grégoire Chamayou. La Société ingouvernable. Une généalogie du libéralisme autoritaire, La Fabrique, 330 pages