Communauté genevoise d’action syndicale

Organisation faitière regroupant l’ensemble des syndicats de la République et canton de Genève

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le congé donné pour juste motif est nul

lundi 7 février 1983 par Claude REYMOND

L’enjeu de cette grève de trois jours était d’obtenir que l’employeur accepte de ne pas imposer sa propre « justice » : à savoir, qu’un Tribunal se prononce sur la validité du juste motif invoqué pour licencier le délégué syndical.

Pendant la grève, une commission de constatation fut nommée, elle était constituée de Olivier OTT pour l’employeur Tribune de Genève et de Martin SCHWARTZ pour le Syndicat du Livre et du papier.

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Sa tâche fut d’établir les faits et de proposer aux parties en conflit une « solution » : au cas où le motif de congé immédiat ne serait pas considéré comme tel, le rapport de travail serait maintenu tel qu’il l’était avant le congé.

Lors du troisième jour de grève on parvient à un accord stipulant que

  • jusqu’au jugement au Tribunal des Prud’hommes, les droits non patrimoniaux sont suspendus (mais payé et assuré). En cas de constat du caractère infondé du congé donné avec effet immédiat, les effets du congé sont suspendus jusqu’à droit définitivement connus. Ainsi jusqu’au prononcé de la première instance, le délégué syndical s’abstient de fréquenter l’entreprise, ensuite ses droits patrimoniaux sont préservés jusqu’à droit jugé (avec possibilité d’exercer ses prérogatives de président de la sous-commission ouvrière, droit au recyclage professionnel, etc.)
  • toutes les mesures de combat sont suspendues jusqu’au prononcé du Tribunal des prud’hommes genevois.

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Maître Gabriel AUBERT accepta l’invitation du syndicat à assumer la défense de Claude REYMOND, il rédigea un avis de droit concernant les multiples prétextes mis en avant par la Tribune de Genève pour se séparer du président de sa commission ouvrière.

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1983-03-14gabriel_Aubert_SLP_Claude_REYMOND.pdf

Le syndicaliste présenta le 21 mars un mémoire au terme duquel il concluait

  • le congé est contraire à l’article 2 al.2 du Code civil suisse ;
(Art. 2
1 Chacun est tenu d’exercer ses droits et d’exécuter ses obligations
selon les règles de la bonne foi.
2 L’abus manifeste d’un droit n’est pas protégé par la loi.)
  • l’art. 23 CCT n’ayant pas été respecté, le congé ne peut pas être converti en préavis ;
  • le salaire étant payé, il ne demande pas d’indemnités ;
  • la fin de la suspension des effets du congé en ce qui concernent les droits non patrimoniaux ne peut que consacrer la nullité du congé.

Pendant ce temps, l’association patronale assigna le syndicat du délégué syndical devant le Tribunal arbitral de l’imprimerie pour violation de la paix du travail.

En effet, dans la mesure où l’employeur refusait de respecter l’art. 23 du CCT (un travailleur de doit pas être licencié pour activités syndicales) et parce que l’association patronale refusait de rappeler à l’ordre son membre, les sections genevoises du SLP et de l’USL (les deux syndicats présents dans l’entreprise) avaient donné l’ordre de grève le lundi matin 7 février 1983 à 06h00.

C’est Gabriel Aubert qui a soutenu la cause des organisations des travailleurs en démontrant que

  • l’association patronale ne peut pas se démettre de ses obligations découlant de la CCT ;
  • l’application de l’art. 23 CCT n’entrave pas le droit de l’employeur selon l’art. 337 CO et que si l’on invoque le caractère impératif du second on éluderait l’application du premier tout en le vidant de sa substance ;
  • la validité du licenciement avec effet immédiat doit être tranchée par le Tribunal des prud’hommes (et non pas seulement se déterminer sur l’existence ou pas de motifs de licenciement avec effets immédiat) - confirmant ainsi le problème de la nullité du congé ;
  • et concluant qu’il fallait condamner les deux parties au paiement d’une peine conventionnelle égale...
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Son argumentation fut communiquée au Tribunal des Prud’hommes genevois. Celui-ci - qui n’avait pas les compétences d’ordonner une réintégration ni d’annuler les effets du congé, même transformé en licenciement ordinaire - prononça le 19 mai 1983 « que le congé donné pour juste motif est nul ».

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Dès lors, le lendemain matin, le délégué syndical retourna à son poste de travail...



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