Communauté genevoise d’action syndicale

Organisation faitière regroupant l’ensemble des syndicats de la République et canton de Genève

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Pas question que l’on joue avec nos emplois !

OUI aux Bilatérales et OUI à la protection sociale

jeudi 18 décembre 2008 par infomation fournie par nos alliés

Malgré les discussions au sein du comité USS du 26 novembre 2008 qui montraient la nécessité d’exprimer les principes qui conduisent le mouvement syndical à recommander le OUI à la libre circulation des personnes, les auteurs se sont étendus sur des raisons économiques - dont plusieurs d’entre-elles ressemblent beaucoup à celles dont certains employeurs se prévalent sur d’autres dossiers pour tenter d’amoindrir encore le faible bouclier social helvétique... regrettable !

commentaire du secrétaire syndical CGAS, 3e représentant des Unions syndicales cantonales auprès du susdit comité USS


Sur quoi sommes-nous appelés à voter ?

Lors de la votation populaire sur la libre circulation des personnes du 8 février 2009, les citoyens et citoyennes suisses devront prendre une importante décision quant aux rapports de leur pays avec l’Union européenne (UE). Ils devront décider s’ils veulent

a) reconduire la libre circulation des personnes avec l’UE des 25 et

b) l’étendre aux nouveaux pays membres (Bulgarie et Roumanie).

Toutefois, l’enjeu de cette votation va au-delà de la libre circulation des personnes. En effet, cette dernière est l’un des éléments des Bilatérales I qui prévoient que, si l’un des accords est dénoncé, les autres tombent avec lui. En se prononçant contre la reconduction de la libre circulation des personnes, les Suisses et Suissesses votent aussi contre les accords bilatéraux conclus avec l’UE. Après le 30 novembre 2009, ceux-ci n’existeraient ainsi plus pour la Suisse.

L’extension de la libre circulation des personnes à la Bulgarie et à la Roumanie se fera graduellement. Pendant sept ans, le nombre de ressortissant(e)s de ces pays ayant le droit de travailler en Suisse restera limité (contingents). En outre, les employeurs suisses ne pourront engager des ressortissant(e)s de ces pays que s’ils ne trouvent personne en Suisse (préférence nationale). Le contrôle, avant l’engagement, du respect des salaires et des conditions de travail usuels locaux sera maintenu. Et si l’immigration en provenance de la Bulgarie et de la Roumanie était excessive après la levée du contingentement, il serait possible de la limiter pendant trois années supplémentaires.

Les accords bilatéraux sont indispensables aux salarié(e)s suisses

La Suisse est un petit pays au cœur de l’Europe. Il lui est donc nécessaire d’entretenir avec l’UE des relations clairement définies et une coopération étroite. Après le refus de l’Espace économique européen (EEE) en 1992, la Suisse a conclu avec l’UE des accords bilatéraux dans plusieurs domaines. Ces accords ont permis une nette amélioration et simplification de la coopération entre les deux parties. Les Bilatérales I de 1999 régissent, outre la libre circulation des personnes, l’admission des produits suisses sur le marché intérieur de l’UE, l’accès des entreprises suisses aux marchés publics de l’UE, les transports terrestres, le transport aérien et la coopération en matière de recherche.

Sans ces accords, de nombreux emplois seraient menacés en Suisse et celle-ci ne serait guère en mesure de maintenir son niveau de salaires. Ils garantissent en outre dans une large mesure à l’économie suisse un accès libre au marché intérieur européen. Ainsi, grâce à l’accord sur les obstacles techniques au commerce, un examen pour approbation suffit pour qu’un produit suisse puisse être vendu dans toute l’UE. Le volume des échanges avec l’UE est impressionnant. Près des deux tiers de nos exportations ont cette dernière pour destination, ce qui génère des recettes annuelles de près de 130 milliards de francs, soit un quart du produit intérieur brut suisse. Si les entreprises suisses devaient, à la suite de l’abolition des accords bilatéraux, diminuer leurs prix de 5 pour cent pour conserver leurs parts de marché, il s’en suivrait une perte de gain d’environ 6,5 milliards de francs qui feraient alors défaut pour le financement des salaires et des investissements. Un autre danger du refus des Bilatérales est la délocalisation dans l’UE de la production des entreprises suisses. La vendeuse ou le peintre suisse ressentiraient aussi les effets de la baisse des recettes à l’exportation ou des délocalisations. En effet, la baisse des salaires dans l’industrie d’exportation signifierait aussi moins de pouvoir d’achat en Suisse. Le revenu et l’emploi de nombreux résidant(e)s suisses dépendent donc directement ou indirectement des exportations. Il est clair qu’un « non » le 8 février 2009 aggraverait considérablement les problèmes économiques actuels de ce secteur.

Les mesures d’accompagnement protègent les salaires et les conditions de travail

Jusqu’à présent, l’Union syndicale suisse (USS) a subordonné son acceptation de la libre circulation des personnes avec l’UE à l’adoption de mesures d’accompagnement destinées à protéger les salaires et les conditions de travail suisses. Sans mesure de protection contre la sous-enchère salariale, le niveau des salaires se mettrait à baisser. Parallèlement, si les employeurs pouvaient embaucher pour n’importe quel salaire, de très nombreux emplois seraient menacés en Suisse. Le rejet de la libre circulation des personnes le 8 février mettrait en danger ces mesures d’accompagnement. Pendant une récession, ce serait particulièrement grave pour les salarié(e)s car, lorsque la conjoncture est mauvaise, les salaires et les conditions de travail subissent encore plus de pressions.

Actuellement, 150 inspecteurs et inspectrices sont déployés dans tout le pays. Ils contrôlent les salaires, la durée du travail et les contributions aux frais de formation continue pour les salarié(e)s suisses et étrangers. Les employeurs qui violent les prescriptions sont mis à l’amende et les employeurs étrangers récidivistes interdits d’activité en Suisse. Ce contrôle a lieu dans un pays où, récemment encore, les salaires étaient un sujet tabou. Les contrôles ont aussi une fonction préventive : sachant qu’ils seront contrôlés, les employeurs prennent leurs précautions.

Au plan cantonal et fédéral, des commissions tripartites surveillent le marché de l’emploi. Si elles constatent que les salaires suisses sont tirés vers le bas, elles peuvent édicter des salaires minimaux. Dans les cantons de Genève et du Tessin, elles ont ainsi fixé des salaires minimaux pour les esthéticiennes, les salarié(e)s de l’économie domestique), ainsi que ceux des centres d’appels. Grâce aux mesures d’accompagnement, le champ d’application d’importantes conventions collectives de travail a pu être étendu ces dernières années. Il en va ainsi des branches du nettoyage (Suisse alémanique), de la sécurité et de la construction en bois.

À la suite des pressions syndicales, des améliorations essentielles ont été apportées ces derniers mois aux mesures d’accompagnement. Les contrôles sont renforcés : à l’avenir, le nombre de ceux auxquels sont soumis les employeurs suisses augmentera de près de 50 pour cent. Un contrat-type de travail, fixant un salaire minimal légal, a été édicté pour la première fois dans le secteur de l’économie domestique, une branche très peu réglementée à ce jour. Dans la branche temporaire, les partenaires sociaux ont négocié une convention collective de travail, dont le champ d’application sera étendu. Ces deux instruments comblent deux lacunes importantes des mesures d’accompagnement et le niveau de protection de deux branches précaires s’en trouve considérablement amélioré.

Meilleures conditions de séjour grâce à la libre circulation des personnes

La libre circulation des personnes améliore les conditions de séjour des ressortissant(e)s de l’UE et ouvre de nouvelles perspectives professionnelles aux ressortissant(e)s suisses.

La première amélioration bénéficie aux ressortissant(e)s de l’UE qui vivaient déjà en Suisse avant la libre circulation des personnes. Ils sont désormais mieux intégrés sur le marché de l’emploi, ce qui a aussi des économiques bénéfiques. Ainsi, l’assurance-chômage, notamment, voit ses charges diminuer. En outre, la coordination des droits aux prestations des assurances sociales en cas de migration et la reconnaissance des diplômes et des qualifications s’en trouvent améliorées.

Grâce à la libre circulation des personnes, les Suisses et les Suissesses peuvent beaucoup facilement emmagasiner des expériences professionnelles à l’étranger. Cette mesure est surtout favorable aux jeunes, qui ont ensuite la possibilité de les mettre à profit en Suisse
Les craintes d’une flambée de la criminalité entraînée par la libre circulation des personnes sont sans fondement. En effet, celle-ci ne s’applique qu’aux personnes au bénéfice d’un contrat de travail. Pour les autres, elle ne modifie aucunement les dispositions réglant l’entrée en Suisse. Dès lors, quiconque brandit le spectre de bandes de criminels roumains qui envahiraient le pays si la libre circulation des personnes était étendue est soit un menteur, soit un ignorant. Au contraire, un « non » le 8 février 2009 gênerait la lutte contre la criminalité. En effet, la coopération en cette matière s’est améliorée grâce aux accords bilatéraux.

Pas de conséquences fâcheuses pour les assurances sociales

Selon les données du SECO, l’accord sur la libre circulation des personnes occasionne dans certaines branches des assurances sociales suisses des surcoûts de l’ordre de 240 millions de francs, dus avant tout au versement dans l’UE de certaines prestations de l’assurance-maternité et à une meilleure prise en compte des versements effectués antérieurement à l’AVS. Toutefois, les personnes actives provenant de l’UE ont acquitté des cotisations aux assurances sociales bien plus élevées, de sorte que, l’un dans l’autre, le bilan est positif pour la sécurité sociale. Un « non » le 8 février aurait de graves conséquences pour les assurances sociales suisses. La pression sur les salaires et l’emploi qui découleraient de l’abolition des accords bilatéraux I provoqueraient notamment une baisse des recettes de l’AVS, de l’AI et de l’assurance-chômage.

Le danger d’un abus des prestations de l’assurance-chômage est faible. Pour avoir droit à celles-ci, il faut avoir cotisé au moins 12 mois, faute de quoi, la personne au chômage ne peut pas faire valoir de prétentions. Les personnes au bénéfice d’un permis annuel peuvent en principe rester en Suisse lorsqu’elles tombent au chômage, à condition de toucher les prestations de l’assurance-chômage et de rechercher sérieusement un emploi. Cependant, cette pratique était déjà appliquée avant l’accord sur la libre circulation des personnes. Les séjours à l’année étaient aussi prolongés en cas de chômage. Même si ce dernier progresse fortement en Suisse, l’assurance-chômage ne devrait pas enregistrer de dépenses beaucoup plus élevées qu’auparavant à cause de la libre circulation des personnes.
Pas d’affaiblissement des mesures d’accompagnement

Les mesures d’accompagnement doivent être systématiquement appliquées. Différents milieux veulent toutefois les affaiblir :

  • Le conseiller fédéral Merz veut, pour les marchés de la Confédération et des cantons, que ce ne soient plus les salaires du lieu d’exécution des travaux qui s’appliquent (principe du lieu d’exécution), mais ceux du siège de l’entreprise adjudicataire (lieu de provenance). Eu égard aux forts écarts salariaux en Suisse et à l’étranger, cette mesure exercerait de lourdes pressions sur les salaires.
  • Les employeurs de l’UE et certains de leurs homologues en Suisse exigent un assouplissement des mesures d’accompagnement, notamment de l’obligation d’annonce préalable de la mission, bien que l’UE connaisse aussi une telle mesure. Or, si les entreprises de l’UE ne doivent plus annoncer leurs missions en Suisse, elles ne pourront plus être contrôlées.
  • Souvent, les agences de travail temporaire en particulier ne respectent pas les salaires et conditions de travail usuels en Suisse. La loi exige du SECO et des cantons qu’ils leur interdisent toute activité. En dépit des nombreuses infractions, cette sanction est cependant restée rare à ce jour.

Afin de garantir une protection suffisante aux salaires et aux conditions de travail en Suisse, il n’y a pas lieu d’assouplir les mesures d’accompagnement. Le Conseil fédéral doit retirer sa proposition d’affaiblir la protection des salaires sur les marchés publics. Les dispositions relatives à l’annonce préalable ne doivent pas être assouplies. S’agissant des agences de travail temporaire, l’exécution de la loi doit être plus rigoureuse : celles qui ne respectent pas les conditions de travail doivent être fermées. L’USS combattra toute velléité d’assouplissement des mesures d’accompagnement.