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Sperisen, une justice coloniale

mardi 12 mai 2015 par Claude REYMOND

De Catherine Focas chroniqueuse judiciaire dans la Tribune de Genève le 12-05-2015 à 21h08

Le premier procès avait duré trois semaines, le second, trois jours. Comme si les juges voulaient se débarrasser au plus vite de la corvée avant l’Ascension. Du point de vue d’Erwin Sperisen, ex-directeur flamboyant de la police nationale civile du Guatemala (PNC), c’est la descente aux enfers. Le verdict de première instance vient d’être confirmé en appel.

Pour la deuxième fois, à un an d’intervalle, l’homme est condamné à la prison à vie pour assassinat. Coupable, ont estimé les magistrats genevois, d’avoir fait éliminer dix détenus rebelles dans deux prisons de ce pays d’Amérique centrale en 2005 et 2006. Le procureur Yves Bertossa, les avocats de la partie plaignante, l’ONG TRIAL, bref, tous ceux qui ont poursuivi Erwin Sperisen, pavoisent et applaudissent.

Contrairement à l’Autriche, qui a acquitté le bras droit de l’accusé et qui n’a vraiment rien compris, Genève a eu le courage de condamner, entend-on. La justice genevoise serait ainsi entrée dans l’histoire. Mais laquelle ? Car s’il est vrai que ce deuxième procès s’est déroulé de manière bien plus calme que le premier – la présidente, Alessandra Cambi, prenant soin de respecter les formes et de laisser la défense aller jusqu’au bout de ses phrases – sur le fond, l’affaire était pliée dès le premier jour.

Le fait même de laisser subsister dans ces débats une partie plaignante (la mère d’un détenu tué à Pavón) qui ne se souvient plus d’avoir porté plainte contre Erwin Sperisen, discrédite tout le processus. L’évacuation, de surcroît si rapide, si facile, de témoignages contradictoires, de trous dans la chronologie des événements, n’arrange rien. Aucun notable local n’aurait été condamné sur de telles bases. Mais, quoi qu’en dise la Chambre d’appel et de révision, le Guatemala, c’est loin. Alors oui, l’épisode restera gravé dans les mémoires. Mais pas de la même manière pour tous. (TDG)



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