à la mémoire du 9 novembre 1932, pour la démocratie et la liberté
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LORS DU MEETING D’ANNIVERSAIRE DU 9.11.1932 (50e)
Chers amis, Chers Camarades,
Nous ne venons pas ce soir pour justifier notre attitude de l’époque, mais pour affirmer notre spécificité, avant la guerre et aujourd’hui par rapport à la crise du système capitaliste.
Nous sommes heureux d’avoir été invités à l’organisation de ces journées de commémoration.
Dans la ligne de notre participation au 1er Mai depuis 1972, c’est aussi une marque de notre reconnaissance comme une composante à part entière du mouvement ouvrier genevois. Le pluralisme syndical actuel apparaît comme un moyen nécessaire pour garantir à des pratiques syndicales différentes de s’exprimer. D’ailleurs, à côté de nous, dans le mouvement syndical, nous ne trouvons pas un bloc monolithique.
Au lendemain de la fusillade du 9 novembre 1932, le Secrétariat Chrétien-Social publiait un communiqué où il renvoyait dos à dos « fascistes et socialistes qui provoquent le désordre, l’émeute et la guerre civile ».
De même, il condamna la grève générale du 12 Novemvbre, décrétée par les syndicats révolutionnaires et le parti socialiste.
Pour comprendre cette position, il faut rappeler que les syndicats chrétiens avaient été créés par des femmes et des hommes à qui leur foi chrétienne et le respect de l’encyclique du pape Léon XIII Rerum Novarum interdisaient de prôner la lutte des classes et l’avènement d’une société socialiste avec la dictature du prolétariat, aux côtés de syndicats et de partis qui en faisaient l’axe de leur lutte.
La doctrine de la corporation, anti-capitaliste et anti-communiste, voulait promouvoir la paix sociale en organisant les professions dans le cadre de commissions paritaires, les conflits devant être réglés, sans recourir à la grève, par conciliation et arbitrage obligatoire.
Cette position de troisième voie, difficile à tenire dans le contexte de bipolarisation de l’époque, vit un certain nombre de militants, dont le Secrétaire Général du Syndicat, attirés par les fascistes de l’Union Nationale, anti-sémites, anti-libéralistes et anti-marxistes. Ils participèrent à des manifestations publiques communes. Il est vrai, mais ce n’est pas pour les excuser, que le fascisme n’avait pas encore montré son visage sanglant et totalitaire.
Les idées corporatistes sont relayées au niveau politique par le parti indépendant chrétien-social, qui deviendra plus tard le Parti Démocrate Chrétien.
Le travail paritaire avec les patrons apporta des réponses réformistes partielles à la crise et à la grande misère régnant à GENEVE :
Le corportatisme avait été violemment attaqué par l’USS et les partis de gauche.
Mais ceux-ci, à part le Parti Communiste, vont bientôt abandonner toute référence à la lutte des classes et à un programme de socialisation des moyens de production et vont participer au consensus national devant les périls extérieurs (le socialiste NOBS entrera au Conseil Fédéral en 1943).
En 1937, c’est le début de la paix du travail, corollaire de la communauté professionnelle prônée par l’USS et dont le contenu n’est pas très différent de celui de la corporation. L’initiative sur la participation refusée par le peuple en 1974 allait aussi dans le même sens. Cette nouvelle ligne syndicale est acceptée à GENEVE, sauf par la FOBB de Lucien TRONCHET, principal adversaire des Jaunes chrétiens du Bâtiment.
Dans le même temps, les Syndicats Chrétiens font une évolution interne en sens inverse. Ils vont abandonner la corporation, qui profitait plus aux patrons qu’aux travailleurs. Le refus de la gestion paritaire de la Caisse de Compensation sera la goutte d’eau qui fera déborder le vase.
Cette indépendance par rapport aux patrons va se doubler d’une autonomie par rapport au Parti Indépendant Chrétien-Social, autonomie totale aujourd’hui, malgré le sigle chrétien que nous portons encore ensemble. Les permanents syndicaux de la FSCG ne peuvent être ni députés, ni membres du Comité d’un parti.
Dans beaucoup de conflits, par exemple les grèves des ferblantiers, de 1944 et 1954, nous étions aux côtés de nos camarades de l’USS, en jouant parfois un rôle moteur, montrant ainsi que nous n’avions rien à leur envier dans leur volonté de se battre et de remettre en cause les rapports d’exploitation.
Les boycotts des Syndicats Chrétiens durèrent plus longtemps dans le Bâtiment et l’Imprimerie. La zone du silence aux TPG n’est pas si lointaine.
Aujourd’hui, des syndicats de l’USS et des Syndicats Chrétiens arrivent à agir ensemble. Des problèmes restent pourtant : problèmes liés à l’histoire, à la méconnaissance de l’autre, au refus de se remettre en cause d’un côté comme de l’autre, et au refus de partager un certain pouvoir, ce qui nuit à tout le mouvement syndical.
Depuis 1974, le capitalisme suisse et international est entré à nouveau dans une crise prolongée semblable, par certains côtés, à celle des années 30, faisant baisser le revenu réel des travailleurs et recréant le chômage permanent.
Cette crise met en lumière les limites du mouvement syndical, englué dans la politique du consensus et de la paix du travail, alors que les acquis des conventions collectives sont attaqués par le grand capital, ce mouvement syndical :