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Saisie réalisée (du 23 au 30 janvier 2015) par Claudio DA CRUZ dans le cadre d’un stage en qualité d’assistant administratif auprès de la CGAS
Publication : Journal de Genève ; Date : Mai 2, 1890 ; Section : None ; Page : 3
CHRONIQUE LOCALE
Matinée internationale - Si les promoteurs
de la « matinée internationale » organisée
au café de Florissant à l’occasion de la manifestation
du 1er mai, ont compté sur une
grande affluence d’ouvriers, ils ont du être
grandement désappointés. Le nombre des
manifestants a en effet été fort minime.
D’ouvriers, on n’en a guère vu paraître,
et, quoique la convocation ait été
faite par le « parti démocrate socialiste
suisse », on aurait eu quelque peine à trou-
ver des Suisse parmi les manifestants.
C’est vers neuf heures du matin qu’on a
vu paraître, sur la route de Veyrier, quelques
groupes qui se rendaient au café de
Florissant. L’un d’eux, nous dit-on, a cherché
en passant à décider un cantonnier à
célébrer avec eux la fête de la journée de
huit heures, mais ce dernier a à peine
répondu et s’est aussitôt remis à son travail.
Peu à peu le nombre de personnes
réunies dans le jardin du café de Florissant
s’accroît ; vers dix heures nous en comptons
une centaine, dont vingt-six femmes, pour
atteindre, un peu plus tard le chiffre de
cent vingt. Ce sont pour la plupart, des
étudiants russes à longue chevelure, des
étudiantes de même nationalité à cheveux
courts, des étudiants bulgares et serbes,
ainsi que des socialistes allemands.
L’œillet rouge (boulangiste ?) orne la
boutonnière de plus d’un assistant et quelques -
uns portent des cravates rouges.
Un groupe de Polonais arrive avec le drapeau
de la Société ouvrière polonaise, d’un
rouge immaculé d’un côté et portant de
l’autre le nom de la Société. Un peu plus
tard, des socialistes allemands apportent un
grand drapeau rouge qui porte d’un côté
l’inscription suivante : 1er mai 1890. Ces
deux drapeaux sont suspendus à des arbres
du jardin. Au fur et à mesure qu’ils arrivent,
les manifestants prennent en général
tranquillement place aux tables dressées
dans le jardin et forment des groupes souvent
fort originaux par les types curieux
qui se trouvent réunis.
Bientôt des jeux s’organisent et les participants
ne craignent pas de se livrer aux
délassements les plus innocents, tels que
jeux de tonneaux et de boucle. D’autres
enfin, nouveaux Guillaume-Tell, essaient
leur adresse au tir à l’arbalète. Sur une
table on déballe des livres et brochures révolutionnaires
en majeure partie en langue russe.
Dans l’après-midi, la pluie a chassé les
manifestants du jardin. Ils se sont réunis
dans une salle du premier étage, où quelques
allocutions ont été prononcées.
Au moment où nous mettons sous presse,
les manifestants se préparent à former un
cortège pour rentrer en ville.
Manifeste – Nous avons trouvé, dans notre
Courrier, le manifeste suivant, qui a été
affiché sur les murs et arraché par la police.
Déclaration anarchiste
Travailleurs !
Dans tous les pays, les gouvernants, pour maintenir
les masses dans la misère et l’oppression, pratiquent
les persécutions les plus odieuses.
Tracasseries, poursuites, expulsions, emprisonnements,
Tous moyens leur sont bons pour rassurer
les exploiteurs dont ils sont les inséparables complices.
Les peuples de leur côté relèvent la tête, les esclaves
déclarent la guerre à leurs maitres, les affamés
se révoltent contre les affameurs, les victimes
se ruent sur les bourreaux. C’est la lutte des
classes, lutte qui doit amener la fin de l’exploitation.
et l’affranchissement humain.
Un ramassis d’intrigants et d’ambitieux, journalistes,
députés, assoiffés de places et de pouvoir,
cherchent à étouffer l’esprit de révolte et à convertir
l’agitation révolutionnaire en une manifestation
mendigote et pleurarde. – Les travailleurs ne
se laisseront pas prendre au piège. Ils n’iront rien
demander aux gouvernants, leurs ennemis irréconciliables.
Ces manifestations organisées à l’avance
sur le mot d’ordre de chefs ne peuvent servir qu’à
la réclame électorale.
Les manifestations utiles sont celles qui naissent
de l’initiative individuelle spontanément éveillée.
Sans spontanéité, pas de fougue, pas d’élan.
Compagnons de chaines !
Ce n’est pas la charité qu’il nous faut, c’est la justice.
Les politiciens, pour satisfaire leurs ambitions
malsaines, nous crient « Soumission » : répondons
en faisant entendre les clameurs de la « révolte. »
La misère étend tous les jours ses ravages, on
meurt de faim dans les taudis ouvriers, tandis que
les exploiteurs, dans les superbes habitations bâties
par nous, jouissent de tous les bienfaits de la vie.
Il y a trop longtemps qu’une poignée d’individus
Détiennent les richesses de l’humanité. C’est
En faisant à ces parasites et é leurs souteneurs une
Guerre acharnée, mortelle, que nous pourrons à
Notre tour être heureux et vivre. - Ce n’est pas
En allant leur mendier une futile et impossible
législation du travail.
Puisque cette manifestation a lieu, si nous y
prenons part, que ce soit pour prouver par des
démonstrations énergiques, par des actes de révolte
individuels ou collectifs, que les endormeurs
politiques ont fini leur temps et que le peuple
commence à compter sur lui-même.
Camarades de misères !
N’implorons pas : exigeons ! – Ne demandons
pas : prenons ! – Ne faisons pas pitié : faisons peur !
Vive l’esprit de révolte ! - Vive l’humanité libre !
(publié dans l’édition du soir.)
Matinée internationale - Comme nous
1’avons dit, la pluie a forcé dans l’après-midi
les participants à la « matinée internationale »
du café de Florissant à chercher
un abri à l’intérieur de cet établissement.
Quelques tables et des chaises ont été trans-
portées dans une salle du premier étage ;
les membres du comité promoteur ont pris
place aux tables et quelques allocutions ont
été prononcées. Les membres du bureau
qui se sont donnés comme les initiateurs de
cette petite réunion internationale parais-
sent tous être des étrangers.
Le premier orateur parie en allemand. Il
dit entre autres que c’est la première fois
que les ouvriers du monde entier se réunis-
sent le même jour dans une même pensée.
L’orateur ajoute que la revendication de la
journée de huit heures n’est qu’un premier
pas dans la voie des revendications des ou-
vriers ; ils veulent également que les diffé-
rences qui existent entre les riches et les
pauvres disparaissent. L’orateur termine
en acclamant la démocratie sociale inter-
nationale.
Le second orateur, qui fait partie du co-
mité d’organisation, parle en français ; il
s’excuse de ne pas s’exprimer correctement
dans cette langue, car il est étranger. Son
accent semble en effet indiquer qu’il est
d’origine slave. Cet orateur dit que les tra-
vailleurs veulent montrer leur force par la
manifestation d’aujourd’hui. Il dit qu’il n’a
pas besoin d’expliquer aux assistants ce que
c’est que la société future comme l’enten-
dent lui et ses amis, tout le monde le sait.
Ce que les travailleurs veulent c’est la pos-
session des instruments de travail, que ceux
qui les exploitent détiennent aujourd’hui.
Ils veulent à côté de huit heures de travail
huit heures de repos pour étudier leur situa-
tion et leurs misères, et c’est, d’après l’ora-
teur, justement ce que les exploiteurs ne
veulent pas accorder, parce qu’ils ont peur
que les ouvriers ne voient clair dans leur si-
tuation.
L’orateur nous apprend encore que les
Questions sociales sont résolues, qu’il ne s’a-
git plus que de passer à l’application. Puis un
autre membre du bureau se lève et dit que,
quoique cette réunion soit publique, aucune
table n’a été dressée pour les journalistes.
Il veut bien cependant ne pas mettre les
Reporters présents à la porte, mais il les en-
gage à ne pas faire dire aux orateurs autre
chose que ce qu’ils ont dit.
L’assemblée applaudit naturellement ces
paroles avec entrain et elle entonne en alle-
mand la Marseillaise, mais cette produc-
tion musicale manque d’ensemble et on
s’arrête après le premier couplet. Un troi-
sième membre du bureau déclame en alle-
mand une poésie révolutionnaire. Plus le
président lève la séance sous prétexte que
dans le jardin on parle avec plus de facilité.
Le temps s’était éclairci et on reprend les
Jeux sur la terrasse du café.
Enfin, conformément au programme, un
cortège se forme à cinq heures et demie et
se dirige vers la ville. En tête marche un
groupe de cinq à six individus ayant l’appa-
rence d’ouvriers mécaniciens, que nous n’a-
vons pas vus parmi les manifestants de la
« matinée internationale » et qu’on semble
avoir mis en tête pour la bonne façon. Trois
d’entre eux portent des drapeaux, deux
drapeaux fédéraux et un aux couleurs ge-
nevoises, mais dont le jaune est enroulé sur
la hampe. Après ce groupe viennent les deux
drapeaux rouges puis une centaine de ma-
nifestants.
Sur la route de Veyrier, on chante dans
le cortège, qui marche en désordre ; on en-
tend les accents de la Marseillaise, du
Chant du Départ et d’autres chansons.
Avant d’entrer en ville, le cortège s’ar-
rête et ses chefs reforment les rangs. A
partir de ce moment, les manifestants mar-
chent silencieux et un ivrogne qui les précé-
dait en braillant et en brandissent un gour-
din, est éloigné par les manifestants eux-
mêmes. Le cortège passe par la rue Ami-
Lullin, le boulevard Helvétique, le Cours
de Rive et les rues Basses jusqu’au Molard,
pour se rendre ensuite par la place de la
Madelaine au café Toggweiler, à la porte
duquel les manifestants se séparent en se
donnant rendez-vous pour le soir au Bâti-
ment électoral.
Sur tout le parcours, les passants s’arrê-
taient étonnés et regardent défiler cette
procession d’un air plus ou moins gouail-
leur.
L’assemblée du Bâtiment électoral - Dès
avant huit heures, une foule énorme était
réunie au Bâtiment électoral à l’occasion
de l’assemblée en faveur de la journée de
huit beures. A partir de huit heures et
quart, on s’écrasait littéralement dans la
vaste salle ; nous ne savons pour quelle part
le nombre des curieux entrait dans la composition
de l’assemblée.
La tribune habituelle avait été dressée
au fond de la salle et les membres du comité
d’organisation, portant un ruban rou-
ge à la boutonnière, ainsi que l’Union mu-
sicale tessinoise, y prennent place. Les
journalistes y sont, également admis. La
salle est houleuse et par moments on voit
comme des vagues se former au milieu de
cette mer humaine.
Beaucoup de personnes qui avaient au
début pris place sur es bancs sont bientôt
bousculés. Aussi se dispute-t-on sur divers
points de la salle ; des bancs se brisent et
ceux qu’ils portaient tombent sur leurs
voisins.
Après un morceau joué par la fanfare,
M. Engeli, qui préside, donne la parole à
M. Favon. Celui-ci débute en disant qu’il
suppose que c’est comme l’un des promoteurs
de la législation du travail qu’on lui a
demandé de prendre la parole.
L’orateur donne la journée de huit heures
comme un idéal conforme aux principes
de justice, et dit que l’ouvrier a besoin de
se retremper dans la vie de famille après
son rude labeur. C’est un idéal désirable,
un but lointain, et nous tâcherons, dit-il,
d’arriver à le réaliser, en partie du moins.
M. Favon s’efforce de répondre à toutes
les objections qui ont été faites à la journée
de huit heures et termine en conjurant les
ouvriers de se constituer en syndicats pro-
fessionnels, de se solidariser entre eux et
d’obtenir la réalisation de la législation do
travail qu’ils réclament.
La musique joue un pas redoublé, puis
M. Aeby, délégué des associations ouvrières
de Berne, prend la parole en allemand. Il
fait l’historique de la lutte des ouvriers contre
le capital et dit que la journée de huit
heures n’est qu’une étape dans l’œuvre de
l’émancipation ouvrière.
Il donne ensuite lecture du projet de ré-
solution en faveur de la législation interna-
tionale du travail. En terminant, l’orateur
s’écrie que l’ouvrier ne veut pas l’aumône
mais qu’il réclame son droit, et il espère
l’obtenir par des moyens légaux.
Nouveau pas redoublé. On réclame, mais
en vain, la Marseillaise. M. Engeli déclare
la séance levée.
La plupart des assistants n’entendent
absolument pas les discours, mais on ap-
plaudit quand même. Quant aux curieux,
ils se sont abstenus de toute manifestation
contraire et nous n’avons entendu qu’un ou
deux coups de sifflet.
Au moment de la sortie, un des pan-
neaux du bureau est tombé sous le poids
des personnes qui s’y étaient suspendues.
La sortie s’est effectuée sans autre inci-
dent et il n’y a pas eu de cortège.
Beaux-Arts – Nous apprenons que deux
tableaux de M. Albert Gos, un Cervin et
une Barque sur le lac Léman, que quel-
ques uns de nos lecteurs ont sans doute pu
voir récemment dans son atelier, ont été
admis à l’exposition de l’Académie royale
de Londres.
Nous profitons de l’occasion pour signa-
ler aux amateurs de peinture alpestre une
toile du même peintre, représentant un al-
page, actuellement visible dans la vitrine
de M. Foulquier, encadreur, rue des Alle-
mands.
Dans ce petit tableau, qui est peut-être
sa meilleure œuvre, M. Gos est arrivé,
sans aucune recherche de l’effet, à expri-
mer avec beaucoup d’intensité la poésie de
la montagne.
Horlogerie – Le comité directeur du
Journal suisse d’horlogerie ouvre un con-
cours pour des mémoires inédits sur le tra-
vail des métaux employés par le mécanicien
et l’horloger à l’exclusion des métaux dits
nobles.
Les travaux peuvent être écrits en fran-
çais, en allemand ou en anglais. Ils devront
être remis ou expédiés au comité directeur
du Journal suisse d’horlogerie, 2, rue Nec-
ker, à Genève, jusqu’au 30 novembre 1890,
délai qui, eu aucun cas, ne sera prolongé.
On peut se procurer à la même adresse le
programme de ce concours.
Une somme de 200 francs (dont 50 pro-
venant du concours précédent) sera appli-
quée, s’il y a lieu, à un ou plusieurs prix.
Un diplôme spécial sera en outre remis aux
Concurrents qui auront obtenu un prix ou
une mention.
Les récompenses suivantes ont été décer-
nées à l’occasion du précédent concours sur
le travail et l’emploi des pierres dures en
horlogerie : deuxième prix, MM. Jean Frey-
mond, à Bienne, fr. 50 ; Emile Fournier, à
Genève, fr. 50 ; troisième prix, MM. L.
Chevalier er P. Cautez, à Genève, fr. 30 ;
mention honorable, M. Louis Piaget, à Ge-
nève, fr. 20.
Repos du dimanche – Le secrétaire de la
fédération internationale pour l’observation
du dimanche a adressé à M. Noblemaire,
directeur de la compagnie du P.-L.-M., une
lettre attirant de nouveau son attention sur
le fait qu’à la gare de Genève il se trouve
de vingt-cinq à trente employés au service
de la traction qui ne touchent aucun salaire
pour les dix-huit jours de repos que leur
accorde la loi fédérale. Ces hommes sont
des laveurs du petit entretien et des net-
toyeurs de machines, et comme ils sont em-
ployés d’une manière permanente, il semble
juste que, comme aux autre employés, on
ne leur retienne pas leur paie pour les jours
de repos. Cette demande sera, nous n’en
doutons pas, accueillie favorablement par
la Compagnie, qui, dans le Congrès du repos
hebdomadaire, s’est prononcée énergique-
ment pour la fermeture complète des gares
de petite vitesse le dimanche.
Le chemin de fer de l’Etat de Wurtem-
berg a décidé d’accorder un ou deux jours
de congé par mois à tous ces ouvriers et
agents employés à la journée, et cela sans
supprimer la paie. La compagnie des che-
mins de fer de l’Est français a pris un dé-
cision analogue.
On voit que, de tous côtés, l’idée de jus-
tice à l’égard des employés des chemins de
fer se manifeste et s’impose de plus en
plus.
Cercle démocratique – On nous prie
de rappeler que l’assemblée générale annuelle de
la section littéraire et musicale du Cercle démocra-
tique a lieu demain soir, samedi, à huit heures du
soir au local du Cercle.
Samaritains - La première réunion
mensuelle des dames samaritaines aura lieu samedi
3 mai, à 2h ½ de l’après midi, rue Calvin, 7.
DERNIERES DEPECHES
BERNE, 1er mai.
Les manifestants en faveur de la journée
de travail de huit heures se sont réunis en-
tre une heure et demie et deux heures sur
la place du Grenier-à-Blé. Les sociétés, déjà
formées, arrivaient de tous côtés et pre-
naient place au fur et à mesure dans le cor-
tège. A deux heures et quart le cortège
s’est mis en route. Il comprenait douze
cents manifestants et seize sociétés (typo-
graphes, maçons, serruriers, cordonniers,
forgerons, couvreurs, etc.). Chaque société
était précédée de son drapeau ou de son
enseigne, et la plupart avaient en outre une
fanfare ou des batteries de tambours. Outre
ces emblèmes, on remarquait un drapeau
rouge d’un énorme volume. Ayant pour ins-
cription : « Code des droits de l’homme »,
et un écriteau portant la caricature d’un
officier à cheval avec cette inscription : « Le
4 mai (jour des élections su Grand Conseil)
vous ne voterez pas » ; cet écriteau visait
probablement le colonel Scherz, directeur
de la police municipale. On remarquait
beaucoup d’Allemands et de Piémontais
parmi les manifestants. De distance en dis-
tance, des manifestants décorés de cocardes
veillaient au bon ordre.
Le cortège a descendu puis remonté la
Grand’Rue ; il a suivi ensuite la rue du
Marché, la Place de l’Ours, la rue Fédérale,
la place Christophe et le boulevard exté-
rieur, pour se diriger ensuite vers l’Enge,
Bierhübeli, où des discours doivent être
prononcés. Partout une grande foule assis-
tait au passage du cortège.
L’ordre n’a cessé de régner dans le cor-
tège pendant tout trajet. Les ouvriers
étaient endimanchés et marchaient au pas,
avec une discipline parfaite, sans proférer
aucun cri ou aucune provocation.
BERNE, 1er mai.
Le cortège des manifestants est rentré
vers 6 heures en ville, toujours en bon or-
dre.
Huit cents ouvriers de la fabrique de ma-
chines d’OErlikon (Zurich) ont suspendu au-
jourd’hui le travail.
A Winterthour, au Casino, aura lieu ce
soir une assemblée populaire où M. Greu-
lich, secrétaire des ouvriers, se fera enten-
dre. Dans cette ville, le travail n’est géné-
râlement pas suspendu.
DANTZIG, 1er mai.
Les ouvriers travaillent presque partout.
Un moulin à huile et quelques chantiers de
construction chôment seuls. Les ouvriers
employés aux fortifications, excités par quel-
ques jeunes gens, ont abandonné le travail ;
les instigateurs de cette grève ont été im-
médiatement arrêtés.
CHEMNITZ (Saxe), 1er mai.
Toutes les fabriques travaillent.
MULHOUSE, 1er mai.
Sauf dans les établissements encore at-
teints par la grève précédente, il n’y a de
chômage nulle part. Il en est de même dans
le reste de l’Alsace-Lorraine.
VIENNE, 1er mai, 5 h. 40 s.
Le Prater est occupé militairement. Jus-
qu’ici, le calme est complet. On annonce
qu’il en est de même en Galicie et dans le
district en grève d’Ostrau. Tous les ou-
vriers travaillent à Troppau et à Brünn.
A Prossnitz (Moravie), quatre mille ou-
vriers ont assailli la prison dans l’intention
de délivrer les individus incarcérés hier.
PEST, 1er mai.
Les ouvriers ont commis des excès devant
la Minoterie à cylindres. La troupe les a
chargés à la baïonnette et en a blessé plu-
sieurs.
Le travail a été repris à la minoterie.
DRESDE, 1er mai.
Tout est tranquille. Des assemblées te-
nues sous la présidence de MM. Bebel et
Singer ont été parfaitement calmes.
PARIS, 1er mai, 3 h. 42.
Une délégation composée de MM. Bau-
Din Thivrier et Ferroul, députés, Guesde et
Vaillant, conseillers municipaux, et six dé-
légués est arrivée à 2 heures à la Chambre,
après avoir décliné les noms de ses membres
avant d’entrer.
Une foule nombreuse est massée aux
abords de la place de la Concorde.
Le calme continue à régner à Paris.
Une vingtaine de curieux ont été arrêtés
a la rue Rivoli, parce qu’ils refusaient de
circuler. Aucun autre incident.
PARIS, 1er mai, 4 h. 25.
M. Floquet a reçu seulement les trois dé-
putés faisant partie delà délégation ouvriè-
re. L’entrevue a duré seulement un quart
d’heure.
Un calme complet continue à régner à
Paris.
PARIS, 1er mai, 5 h. 05.
La délégation qui a porté à la Chambre
la pétition ouvrière s’est séparée tranquil-
lement après avoir remis la pétition.
Une foule assez grande stationne encore
sur quelques points, mais aucun désordre
n’a eu lieu nulle part. Paris présente l’as-
pect du dimanche plutôt que d’un jour de
manifestation.
Les dépêches de province disent que le
calme règne partout.
PARIS, 1er mai, 6 h. 15.
(Service spécial)
Aucune délégation n’est allée à l’Elysée
ni au ministère de l’intérieur.
Par ordre de M. Constans, le préfet de
la Seine s’est installé ce matin à l’Hôtel de
Ville et a pris des mesures pour empêcher
les conseillers municipaux de recevoir au-
cune délégation.
Quand les conseillers sont arrivés à 1 ½
heure, le préfet leur a déclaré que, en de-
hors des sessions, il ne les reconnaissait que
comme de simples citoyens. Les conseillers
ont protesté, mais aucune délégation n’a
été reçue dans l’Hôtel de Ville.
Le Temps dit que sept arrestations seu-
lement, sans importance, ont été effectuées
aujourd’hui.
Au dernier moment, on annonce qu’un
incident a eu lieu aux abords de l’Elysée.
PARIS, 1er mai, 6 h. 30.
L’incident mentionné plus haut est sur-
venu à 4 heures. Un fort groupe de mani-
festants, provenant de la place de la Con-
corde, a voulu passer par la rue du Cirque,
paraissant se diriger vers le palais de l’E-
lysée. La police a voulu l’empêcher de pas-
ser, mais les manifestants ont résisté et il a
fallu dégainer.
L’escadron de gardes municipaux sta-
tionné au ministère de l’intérieur est arrivé
alors et a chargé les manifestants, dont
beaucoup ont été blessés.
De nombreuses arrestations ont été opé-
rées.
PARIS, 1er mai, 7 h. soir.
Les grands boulevards et la place de la
Concorde ont repris leur aspect habituel.
Aucun incident nouveau ne s’est produit.
Parmi les individus arrêtés cette après-
midi on compte peu de Français, la plupart
sont Belges, Suisses, Italiens ou Allemands.
A la préfecture de police on a constaté
qu’une centaine d’individus avaient été ar-
rêtés pour simple refus de circuler ; ils se-
ront probablement relâchés à minuit.
PARIS, 1er mai.
Sept scrutins infructueux ont eu lieu à
l’Académie française pour la nomination du
successeur de M. Emile Augier. Les candi-
dats étaient au nombre de onze, parmi les-
quels MM. Lavisse, Manuel, Thureau-
Dangin ont eu le plus de voix. L’élection
est ajournée à six mois.